Le Jour d’après…

Gueule-de-bois... On se retrouve avec la g... de bois, groggy. Lorsqu'on découvre que le Ministre du Budget, le pourfendeur en chef de la fraude fiscale (et, accessoirement, chantre de la rigueur), est lui-même ... fraudeur fiscal, parjure de surcroît.

Ce scandale (ni le premier, ni malheureusement le dernier) s'annonce comme l'un des plus dévastateurs de toute la Vème République. Je ne parle pas ici des cris d'orfraie des oppositions de tous bords qui se déchaînent, chacune dans son registre, mais des électeurs que ce scandale va renforcer dans leur opinion de "tous pourris" et pousser en rangs encore plus serrés vers l'abstention ou, pire, les extrêmes.

Tous les politiques sont vent debout, criant à la trahison. Mais parlent-ils de la fraude ou du mensonge ?

Certes, ce n'est pas bien de mentir à la représentation nationale. Mais Jérôme Cahuzac est-il le premier à mentir ?

Je ne parle pas ici des bobards "politiques" régulièrement proférés dans les discours de droite et de gauche (et souvent dénoncés par quelques sites tels que "Désintox"  - que je vous recommande) mais des mensonges destinés à cacher une vérité dérangeante.

Non. Je parle de la fraude elle-même. Déjà inacceptable d'un citoyen ordinaire en temps ordinaire, elle est tout simplement insupportable, accomplie par un élu du peuple, d'un Ministre en exercice, en pleine crise économique.

Les politiques ont donc raison d'exprimer leur indignation. Mais en faire trop (alors que la justice est en marche et va faire son travail) ne risque-t-il pas de tourner à la catharsis ? Crucifier un coupable (non encore jugé de surcroît) n'est-il pas un moyen confortable de se blanchir soi-même ?

Il est permis  d'espérer que Jérôme Cahuzac soit le seul fraudeur parmi le millier d'élus qui votent nos lois (députés, députés européens et sénateurs). Mais comment en être sûr ?

Il existe pourtant des garde-fous. Ainsi la Commission pour la transparence financière de la vie politique  est chargée du contrôle des déclarations de patrimoine de plus de 6 000 personnalités (ministres, députés, sénateurs, députés européens, principaux élus locaux et dirigeants d’organismes publics). Elle est chargée de s'assurer qu'ils ne se sont pas enrichis anormalement du fait de leur fonction. Mais, outre que tous les élus ne se plient pas forcément à ses demandes (la lecture de son 15ème rapport fait apparaître que c'est le cas par exemple de 25% des élus régionaux !), qu'il s'agit de déclaratif (Jérôme Cahuzac n'a certainement pas mentionné l'existence de son compte à l'étranger), nous sommes dans une approche comptable, qui constate après coup. Elle punit (cela reste exceptionnel tout de même) mais ne prévient pas les dérives. Elle ne contribue donc pas à l'assainissement de la vie politique.

A l'évidence il faut, notamment s'agissant des élus nationaux, et plus encore s'agissant de membres du gouvernement, être davantage intrusif.

Je propose que ce millier de personnes fassent l'objet d'une véritable enquête, dès leur élection/nomination. Leur responsabilité est telle (vis à vis des engagements qu'ils prennent de notre part, vis à vis de l'opinion publique) qu'elle justifie à mes yeux (de citoyen et de contribuable) le coût d'une telle procédure.

De grandes entreprises publiques ou privées, travaillant dans le cadre de la Défense Nationale par exemple, diligentent ce genre d'enquête lorsqu'elles recrutent de nouveaux collaborateurs à des postes de responsabilité. Sans que cela ne choque personne.

Pourquoi pas la France ?

Il ne s'agit ni plus ni moins que de se donner les moyens de refonder la morale publique.

Share

Commentaires

merci à Bernard pour cette analyse en profondeur. Mais quand Bernard imagine et espère que le cas de Jérôme Cahuzac est unique, je suis attendri par la jeunesse de sa réflexion !
j'y ajouterai une proposition audacieuse: c'est la faute qu'il faut tuer, pas les hommes fauteurs.
Pour tuer la faute, il faut organiser la dissuasion. Il y a du pain sur la planche!
Car comme le disait récemment un grand spécialiste du crime, ce n'est pas la sévérité de la punition qui dissuade le criminel, mais la certitude d'être puni.

je pense que François Hollande est décidé à agir fort: on a en effet trop attendu devant la démoralisation de notre société en général et de nos élus en particulier.

A suivre !

Ajouter un commentaire