Grève, sabotage et droit

Grèves dans le service public : pour un tournant juridique

En France, la grève est un droit constitutionnel. Il n’est pas question d’en contester le principe ni même de discuter de la légitimité des raisons pour lesquelles tels ou tels décident de l’exercer.
Mais il est clair que certains effets des grèves, ou plutôt de leurs excès, nuisent aux citoyens qui les subissent. Quelques mouvements de réaction surgissent d’ailleurs ici ou là depuis peu. Ainsi des usagers abonnés à des services de la SNCF qui réclament des compensations ou remboursement. Ou des étudiants non grévistes qui créent des groupes sur les réseaux sociaux pour s’opposer au blocage de leur université. Des pétitions sont lancées pour protester.

Déjà plusieurs fois utilisée dans un passé récent en France, les coupures d’électricité semblent emblématiques des excès auxquels peuvent être conduits certains grévistes. Ils n’en tirent aucun « avantage matériel », tandis que les dommages sont évidents pour ceux qui les subissent.

Ne pourrait-on pas imaginer un cadre juridique plus contraignant, qui dirait plus clairement où se situe la ligne rouge à ne pas franchir ? On permettrait peut-être ainsi aux grèves de ne pas se transformer en « guerre » (on entend d’aucuns parler de « conflit », « d’attaque », de »bataille », dire que « l’enjeu c’est d’obtenir une victoire », « on a besoin de gagner ») et d’éviter des actes qui provoquent l’hostilité, pour faire (enfin…) de la recherche d’un consensus l’objectif premier à poursuivre.

Par exemple, l'intention déjà affichée de la CGT de procéder à des coupures de courant serait condamnable en Angleterre, alors qu'elle ne l’est pas en France. Les usagers français peuvent subir ainsi les "sabotages" des grévistes.
 Dans le droit français, en cas de litige, chaque partie fait valoir ses droits, sans considération des droits et des dommages de l'adversaire. Notre culture est dominée par ce principe, que le code civil décline à foison.
Dans le droit anglais, il y a un principe différent et essentiel. En cas de litige, chaque partie a une obligation : "to mitigate the cost".
Qu'est ce que cela siignifie ?
Eh bien quand, dans un litige, un Anglais agit pour augmenter délibérément le dommage de son adversaire, sans avantage pour lui même, il devient répréhensible.
On retrouve partiellement cette idée dans le droit français, avec l'intention de nuire, mais c'est très flou, et seulement qualitatif. En droit anglais, c'est quantifié et opposable.

Ce sujet pourrait bien s'inviter dans la grande bataille actuelle de communication sur les grèves. Et ça serait bien....car la France crève de la surabondance de droits individuels et de l'absence ou de l'insuffisance de devoirs collectifs.
Et si le devoir du service public était notamment de limiter l'effet des grèves sur les usagers ? Voilà un joli débat.
Une grande avancée législative a été de ne plus payer les jours de grève. Une autre avancée serait donc de sanctionner les grévistes qui, par leur actes (et non par leur grève) augmentent le préjudice des usagers. Une coupure de courant déclenchée par un gréviste est un acte volontaire...dont nos chers militants CGT (ou autres) pourraient prochainement répondre devant un tribunal.

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