L’avenir d’une élection

070504-RoyalSarkozy.jpgL’avenir d’une élection est toujours prévisible… à posteriori. Le choc de 2002, comme la participation record au premier tour de 2007 peuvent s’expliquer par le fait que les Français sont de plus en plus motivés à se prononcer sur la gestion politique… de leurs vies et enjeux quotidiens. Ce phénomène qu’on pourrait taxer un peu rapidement de montée de l’individualisme est en train de définir la clé de la nouvelle citoyenneté.

Une étude sur l’évolution des mentalités des Français datant de 2005 montrait que ceux-ci appréhendent de la même manière ce qu’ils vivent dans leur quartier, dans leur ville, en France et en Europe. A chacun de ces niveaux, c’est le besoin que les choses bougent pour s’agencer ou se « réagencer » autrement qui réunit les Français. La nouvelle citoyenneté trouve probablement ses racines plus dans le quotidien que dans les convictions.

Nos vies ont changé, nous avons intégré l’incertitude dans nos quotidiens. Individuellement, nous savons que nous devons changer, nous adapter. Collectivement, nous comprenons que nous devrons être français différemment pour trouver notre place dans la mondialisation. Nous ne pourrons plus nous appuyer seulement sur nos statuts et nos voleurs phares. C’est difficile mais nous avons fait sur nous-même le travail personnel qui permet de vivre avec, nous avons agencé différemment nos priorités individuelles et nous sommes en train de le faire pour nos priorités collectives.

Dans le monde tel qu’il est aujourd’hui, chacun d’entre nous comme personne, comme citoyen, comme consommateur doit réagir à plus d’informations, de sollicitations, de difficultés et de voies de solutions. De ce fait nous devenons tous à la fois plus vigilants et plus angoissés face à l’avenir. Cela parce que nous avons de plus en plus de moyens et d’occasions de l’être. Plus nous sommes incertains, plus nous sommes impliqués, plus nous sommes exigeants.

Face à ce mouvement qui n’est pas spécifique à la France mais touche progressivement l’ensemble du monde, les deux candidats à la Présidence proposent de rompre avec le passé et de remettre en ordre la société. Toutefois, quel que soit le résultat du second tour, une moitié de la France sera déçue et inquiète, parce que le Président élu n’incarnera pas la posture face à l’avenir dans laquelle ils avaient placé leur espoir. Mais à bien y regarder l’un et l’autre s’attacheront – comme ils l’ont promis - à répondre à la même question : comment faire partager à la France entière le sentiment et la réussite d’une rupture avec ce qui nous empêchait de trouver une place dans l’Europe, dans le Monde et dans l’avenir.

Lors des présidentielles 2007 l’exigence collective s’est manifestée pour la première fois de manière aussi forte et claire. Mais ni les Français dans leur ensemble, ni les dirigeants politiques ne sont encore en mesure de dire vers quelles orientations cette exigence doit être dirigée. Sans répondre à cette question, on peut tout de même dire qu’il nous faudra composer un avenir entre les trois côtés d’un triangle : la France, le Monde, l’Incertitude.

Ce qui frappe dans la vie moderne, c’est que l’avenir apparaît moins lointain qu’auparavant. De l’accélération des changements naissent des inquiétudes plus stressantes et plus complexes, mais naissent aussi des envies de participer différemment. Dans les cent jours qui suivront l’élection nous aurons l’occasion de voir si la rupture souhaitée par les candidats saura répondre à la rupture que nous vivons avec notre futur devenu si incertain.

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