La fin du « ghosnisme »

090116-Ghosn.jpgIl n’y a pas si longtemps, Carlos Ghosn, patron de Renault et de Nissan, était donné en exemple. « Ghosnisme » était en passe de devenir un nom commun, synonyme d’efficacité. Aujourd’hui, la fascination s’est muée en réprobation. Ghosn « le sauveur » est devenu Ghosn « le sauvage ».

La perte d’adhésion et d’implication du personnel et des cadres est patente. Le « soft capital » dont bénéficiait Renault a été, en grande partie, dilapidé. Pourquoi ? Parce que le maintien ou l’accroissement de la rentabilité à court terme semble avoir été le seul guide des prises d’orientation du tout puissant patron :

Ø       il sert les boulons au maximum, il fait régner la pression ; la presse se fait l’écho de suicides parmi les cadres. 

Ø       il bichonne le cours de bourse en donnant priorité à l’actionnaire sur les autres parties prenantes (la vitalité durable de l’entreprise, sa cohésion, le maintien de l’emploi, la préservation des climats, etc.) 

Ø       la réduction des effectifs est la première réponse à la  baisse des commandes. Les autres mesures paraissent secondaires. 

Ø      la politique de choix de modèles est à l’affût d’opportunités immédiates (la concurrence gagne de l’argent avec les 4x4 ; on décide d’être présent sur ce marché sans tenir compte de la tendance lourde perceptible depuis plusieurs années qui menace ce type de modèle).

Le fait que ces travers sautent maintenant aux yeux est (si l’on peut dire !) un bienfait de la crise. Un intéressant champ de développement pour les intervenants en entreprises s’ouvre ainsi. Il s’agit d’aider des entreprises immergées dans le capitalisme hyper-financier à réveiller une culture du long terme et à adopter des stratégies avisées.

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Commentaires

1. La fascination s'est muée en réprobation.
Carlos Ghosn est proche de Nicolas Sarkozy, il a son écoute, et il le lui
rend bien : ses interventions à la télévision sont bien diffusées, il a une bonne image grâce à sa couverture media, le service de communication interne du président ici n'a pas de cheveux blancs à se faire, il n'est pas attaqué.
Il reste vigilant cependant car dès 2006, c'est à dire un an après sa prise
de fonctions chez Renault, il était déjà perceptible dans certains articles
de presse que l'intelligentsia française était prête à aboyer au métèque fort en thème. Mais il ne s'est rien passé, c'en est resté aux insinuations. Le soutien du président de la République, sans doute.
Toujours est-il qu'on ne peut
parler de réprobation publique envers Carlos Ghosn. Mais nous on sait...

2. Certains suicides
Comme vous parlez de serrage de boulons et que chez PSA il y a eu, en effet,
un ou deux suicides parmi les ouvriers de Pontoise, il faudrait souligner que
les (4 ?) suicides pour lesquels l'entreprise comparaît en pénal à Versailles, ont été commis par des ingénieurs ou des techniciens supérieurs du technocentre, qui ne sont pas aux 35h, qui ne sont pas syndiqués et pour lesquels les objectifs de production ne connaissent pas de limites. J'ai bien noté qu'en l'absence de jugement l'entreprise n'est pas considérée coupable.

3. Le maintien ou l'accroissement de la rentabilité à court terme
Le dogme qui gouverne Renault depuis l'arrivée de Ghosn est de "positionner durablement Renault comme le constructeur européen le plus rentable". Cette phrase est placardée dans toutes les salles de réunion comme le portrait du dictateur dans un pays d'Asie du sud est. Poursuivre l'accroissement de la rentabilité, même à court terme, est terrible quand c'est au détriment de l'investissement. C'est de la poursuivre envers et contre tout qui est diabolique. Lorsque le 24 juillet il annonce qu'il n'attendra pas ses objectifs mais qu'il ne touche pas à celui de la rentabilité (= la marge empochée) c'est là où l'attitude engendre la révolte.

4. la réduction des effectifs est la première réponse à la baisse des commandes.
Excellent. Tout est dit...

5. Stratégies avisées et hyper finance
Renault devrait être le leader mondial du véhicule électrique à longue autonomie, c-à-d 0 émissions, qui révolutionnera le système économique des pompes à essence pour être remplacé par des changeurs de batteries. C'est un beau défi sur lequel est engagée l'entreprise.

Quand on m'a demandé quelles étaient mes motivations pour rejoindre Renault, j'ai immédiatement répondu "L'arrivée de Carlos Ghosn". Il faut dire que
l'aura de bienfaiteur, de celui qui met son intelligence et son talent au service de la collectivité a un pouvoir évocateur fortement romantique.

Au départ, le dirigeant avait choisi de visiter l'entreprise. Silencieux
et visiblement à l'écoute des collaborateurs de toutes les filiales, il laissa la lune de miel durer encore quelques mois. Mais dès les premiers discours publics, pour annoncer le Contrat 2009, contrat simple, répété à satiété avec la méthode systématique des sociétés où l'on ne connaît pas plusieurs sons de cloche, on sentit une sorte de tressaillement, l'inquiétude qui perçait l'espoir.

Avec une constance remarquable, Carlos Ghosn confirma et corrobora toutes les inquiétudes. En moins d'un an de présence, les collaborateurs avaient compris qu'il poursuivait la rentabilité avant tout, avant la durabilité de l'entreprise qui exige l'investissement humain, technique et financier, avant la recherche sans laquelle l'industrie automobile ne peut s'envisager sur plusieurs décennies... En deux ans, ils ont compris ce que son management avait d'inhumain. L'ingénierie véhicule, le coeur où se nouait l'affectio societatis de cette entreprise centenaire était confronté à la délocalisation (on ne renouvelle pas les départs en France pour embaucher, un peu moins, en Roumanie) à une exigence de production jamais atteinte dans l'histoire de l'entreprise (26 nouveaux modèles en 3 ans) et surtout, à ce qui a créé des situations de détresse individuelle aigüe : les entretiens annuels avec
sa hiérarchie étaient réduits à 3 ou 4 chiffres cibles, atteints ou non.
Résultat immédiat, les efforts pour gérer l'infinie complexité du quotidien
n'étant pas reconnus, soit on arrêtait de les faire, soit on tombait en dépression, dans les deux cas, on employait son intelligence pour manipuler les chiffres, et s'il le fallait, au détriment du voisin.

Lorsque le 24 juillet dernier le dirigeant de Renault annonce d'une traite qu'il n'atteindra pas ses objectifs car le monde va mal, mais qu'il ne touche pas à la rentabilité, qu'il la garde dans sa ligne de mire et que pour cela il faut faire partir des gens, les troupes ne sont plus mobilisées. Il s'agit du dernier regain du "ghosnisme".
Fin décembre, la crise économique bien installée, il s'adresse encore aux salariés mais cette fois-ci il parle part de marché et voiture électrique. Les fondamentaux.
Peut-être que la crise aura-t-elle sauvé Renault du ghosnisme.

En tant qu'ancien cadre de PSA, je connais assez bien le secteur automobile.

Quand Renault acquiert Nissan, il ne fait que suivre une mode qui, au final, va coûter bien chère à ceux qui l’ont suivie (Cf Daimler/Chrysler).

La situation catastrophique de Nissan est pour Carlos Ghosn une chance : les Japonais sont prêts à tout accepter pour sauver ce fleuron. Cela tombe bien, il ne leur fera pas de cadeaux.

Pourtant, Nissan était un des constructeurs à la pointe techniquement (des voitures d'ingénieurs) mais avec des modèles à l'esthétique terne et peu valorisants.

Redresser une entreprise de ce type est finalement assez simple : embaucher des designers de talents et quelques experts en marketing peuvent donner la dynamique qui manque. Virer un maximum de monde, et la rentabilité sera au rendez-vous. Et comme la seule alternative est de mettre la clé sous la porte, Ghosn arrive en un rien de temps à redresser la barre.

Prendre la tête de Renault est une tout autre affaire : Renault est un constructeur en bonne santé, avec des modèles attractifs. Ghosn a voulu reproduire sa méthode éprouvée chez Nissan : forcément cela a coincé. Et le mythe s’écroule.

Finalement, le ghosnisme n’a jamais existé qu’aux yeux de ceux qui ne savaient pas regarder.

Fidèle client de Renault, je suis décu par le virage esthetique pris suite a l'arrivée de C Ghosn.
Le style Renault s'est plié au tout marketing: des autos pour plaire à tout le monde. Résultat la Twingo, la Laguna sont triste, ressemble à tout ce qui sort sur le marche. Le koleos est d'une banalité, Ce ne sont plus des Renault mais des autos.!
Ou est l'esprit, l'étincelle qui déclenche l'interet?
Pas étonnant que les ventes s'écroulent, et ce n'est que le debut.

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