"La plus grande révolution de toute l'histoire de l'humanité", par Xavier Denecker

Dans « La plus grande révolution de toute l’histoire de l’humanité » (Inter-Ligere Éditions, 2022), Anne Beaufumé, Jérôme Bondu et Jérôme Coutou s’efforcent de donner des clés pour comprendre les changements accélérés que nous traversons.

Le monde semble s’emballer sous nous yeux, disent les auteurs. Et de citer « Big data, cloud computing, internet des objets, biotechnologie, robotique, imprimantes 3D, biomimétisme, cellules souche, viande de synthèse, nanotechnologies, intelligence artificielle ».

Nous sommes à un moment de bascule dans lequel les découvertes et les innovations dans quatre champs interagissent et provoquent une accélération dans tous les domaines. NBIC : Nanotechnologies (l’infiniment petit), Biotechnologies (la fabrication du vivant), Informatique (les machines pensantes) Sciences Cognitives (l’étude du Cerveau humain).

Les auteurs montrent que dans l’histoire les révolutions industrielles ont été déterminées par des évolutions technologiques : le charbon et la machine à vapeur à la fin du dix-huitième siècle, l’électricité et le pétrole à la fin du dix-neuvième siècle. Le numérique est le moteur de la troisième révolution industrielle en cours, celle de l’informatique et de l’automatisation.

Après « l’homme réparé » grâce aux progrès de la médecine, on parle « d’homme augmenté ». Il est déjà là, disent les auteurs. « Qui aurait imaginé il y a vingt ans que nous aurions quasiment tous « dans notre poche » un smartphone qui nous permettrait de manière nomade, partout dans le monde, de faire des visioconférences, de gérer ses comptes bancaires, ses mails, de se géolocaliser et de trouver le trajet optimal pour se rendre d’un point à l’autre de la planète, de payer des achats, de faire des photos et de les envoyer à des amis ou groupes d’amis ou de les poster sur des réseaux sociaux, etc. ? »

Or, écrit François Dehoze dans une contribution citée dans le livre, « la difficulté intellectuelle première pour penser le numérique tient au fait que l’habitude logique et scolaire, de bon sens, voudrait que l’on pose d’abord les problèmes pour réfléchir ensuite aux solutions. Or, avec l’ensemble des productions techniques, et avec le numérique en particulier, l’ordre est inversé : les techniques s’annoncent toujours comme des solutions de toutes sortes de problèmes, avant que ces derniers aient pu être posés. »

Comment poser les problèmes ? Comment reprendre la main ? Comment rester vigilants et profiter des opportunités des nouvelles technologies pour éviter les perversions et tirer la société qui vient vers l’humanisme ?

Il faut reconnaître que ce livre est plus convaincant dans l’analyse des ruptures multiformes en cours que dans la définition de stratégies pour l’avenir. Du moins a-t-il le mérite de réunir dans un panorama unique des bouleversements qui nous parviennent, jour après jour, fragmentés.

J’y ai, entre autres choses, découvert l’ultracrépidarianisme, ou le fait de parler et donner un avis sur des sujets pour lesquels nous n’avons pas de compétences avérées. Étienne Klein nous révèle que le mot vient d’une devise latine : « Supor ne supra crepidam », le cordonnier ne doit pas parler au-delà de la chaussure !