Nucléaire : l’intelligence d’un client mécontent

La vente, par Areva, d’une centrale nucléaire de nouvelle génération (EPR) à TVO, un client Finlandais, ne contribue pas positivement, du moins pour le moment, à l’image de la filière nucléaire française. La livraison aura au moins trois ans de retard et Areva a dû mettre de coté dans ses comptes plus de deux milliards d’euros pour financer les surcoûts et les litiges.

Dans cette situation, on n’a sans doute pas assez salué l’intelligence du client qui sera peut-être un jour considérée comme un cas d’école : tout en gérant le contentieux né du premier contrat, il négocie l’éventuel achat d’une deuxième centrale au même fournisseur, Areva. Le client a sans doute compris que ses problèmes viennent pour l’essentiel du manque d’entraînement des équipes françaises dû à plusieurs années d’arrêt des programmes nucléaires. Sur un deuxième chantier il profiterait à fond de la mémoire retrouvée.

« L’industrie est un métier d’expérience » souligne  Jean-Claude Leny, PDG de Framatome jusqu’en 1996 et membre du club des vigilants. Les entreprises industrielles supportent mal l’intrusion des politiques à leur tête et dans leurs affaires et elles digèrent difficilement les mariages forcés de compétences différentes, explique-t-il. Le métier de Cogema – la gestion du combustible - n’était pas celui de Framatome – la construction de centrales - et l’assemblage des deux dans Areva est loin d’être une évidence, surtout au niveau des bureaux d’études. Mais surtout quand on cesse de construire des centrales pendant dix ans la continuité se perd, même si on garde tout ou partie des équipes, explique Leny. Les gens se découragent et la compétence n’a plus l’occasion de se transmettre. Exemple : un bon chef de chantier est une personne de 45 à 55 ans qui doit pouvoir faire profiter de son expérience sur le terrain à un adjoint de 35. S’il n’y a pas de chantier il n’y a pas de transmission.

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