Questions à Luc Ferry

N'ayant pu participer à sa conférence au Club des Vigilants, il est quelques questions que j'aurais aimé poser à Monsieur Luc Ferry ...

Il s'agit de  questions, touchant à la finalité fondamentale du système que constitute  l'Education Nationale.

Est-ce un système, rémunéré par tous les citoyens du pays, qui vise à être un instrument d'instruction, destiné à donner aux futurs citoyens de la France, les informations et les modes de réflexion nécessaires et suffisants pour qu'ils soient à même de comprendre leur environnement futur et de s'y mouvoir avec intelligence ?

Est-ce un système, rémunéré par tous les citoyens du pays, qui vise, de plus, à être un instrument d'éducation, destiné à conduire les futurs citoyens au milieu du dédale - des conventions sociales, - des usages culturels, - des règles citoyennes, - des savoirs particuliers utiles actuels, qu'ils devront connaître pour leur permettre, comme membres de notre société "civilisée", de pouvoir vivre ensemble dans un niveau d'harmonie suffisant pour éviter les crises sociales, les comportements spontanés agressifs et obtenir, pour tous, une "qualité de vie" suffisante ?

Est-ce, en outre, un système, rémunéré par tous les citoyens du pays, qui vise en outre à être un instrument de formation professionnelle, destiné à rendre utilisables par l'économie les producteurs-citoyens vus comme des moyens économiques, des "ressources humaines" qui soient immédiatement utilisables telles quelles par les entreprises et autres organisations à but économique ?

Ensuite, un second groupe de questions, relatives à l'économie générale du sytème " Education Nationale " .

Jadis, la formation professionnelle était largement financée, au travers de l'apprentissage et du premier emploi des jeunes, par les acteurs économiques eux-mêmes , acteurs qui, en ces temps immémoriaux, cherchaient encore et principalement à s'attacher et à fidéliser leurs employés et pas seulement les "Hauts Potentiels" (sans doute parce que, ayant "investi en eux", ils ne les regardaient pas seulement comme des "ressources"...)

Notre société semble avoir de plus en plus tendance à ne se représenter la personne, qu'au travers d'une seule de ses composantes, celle de sa "valeur économique". Dans cette hypothèse, Monsieur Luc Ferry ne trouve-t-il pas que nous, les contribuables-citoyens, finançons la création d'une valeur ajoutée importante, celle qui a transformé, par exemple un enfant ignare et immature, dans son état premier, en un brillant ingénieur, gestionnaire, technicien ou bien en un efficace manager, immédiatement "consommable" et utilisable à peu de frais par l'économie ?

Le récent Ministre de l'Education Nationale qu'il a été, pourrait-il dire ou du moins estimer quel est le "prix de revient" complet pour la collectivité, d'un élève au cours de sa scolarité, depuis la maternelle jusqu'à l'obtention de son diplôme de Polytechnique ou de l'ENA, par exemple.

Quel est le prix de revient, pour la collectivité, d'un diplômé de l'Education Nationale sur le pas de la porte de l'entreprise ?

N'est-il pas le résultat d'une véritable "chaîne de valeur ajoutée", d'un "processus" dont le prix de revient est payé par la collectivité mais dont le "prix de vente" aux acteurs et utilisateurs de l'économie est quasi nul ?

Que ferait l'économie malgré son dynamisme cyclothymique sans des "ressources humaines de qualité" ?

En conclusion, comment faire prendre en compte, dans le calcul du prix de revient des produits et services que délivrent les entreprises, la valeur ajoutée créée par le système éducatif national, aujourd'hui très peu financé par les entreprises, du moins sur sa composante professionnelle ?

<br Des personnes intruites, éduquées et formées, prêtes à l'emploi" ne sont-elles pas un peu trop souvent vue comme "des ressources comme les autres, matière ou finance", comme un "pétrole gris" par certaines entreprise actuelles ? (Ceci n'est évidemment pas le cas de toutes les entreprises et certaines mettent réellement en pratique leur responsabilité humaine et sociale !) La rémunération d'un employé par l'entreprise ne doit-elle être analysée que comme de la "location d'énergie d'une ressource humaine" ou bien comprend-t-elle, par nature, une part d'amortissement de la dépense préalable que la collectivité publique a consentie et financée par l'impôt ?

Pourquoi l'Education Nationale ne ferait-elle pas financer, une partie significative de ces dépenses, par les "utilisateurs" que sont les entreprises, dans un cadre contractuel, évidemment ?

Tout ce qui est utilisé a un coût, mais un prix, aussi !

Est-ce donc que la collectivité nationale, donc l'Etat, est devenue le "cultivateur" de bonnes plantes que notre nouvelle économie vient glaner, ici et là, en fonction de ses besoins, sans lien avec la "terre" dans laquelle elles poussent ?

Ce nouveau comportement des entreprises mondiales d'aujour'hui, qui sont de moins en moins "multinationales" mais bien "transnationales", ne présente-t-il pas un risque pour l'avenir d'un "système éducatif collectif" ? La puissance publique,par ailleurs, ne risque-t-elle pas, ainsi, de devenir une sorte de simple D.R.H. au service de l'économie mondiale ?

Une nouvelle forme de guerre entre Etats, n'est-elle pas ainsi en train d'apparaître : celle de la "production de personnel hautement qualifié et à prix compétitif " ?

Mais,... nous revoilà revenus à la "guerre économique et sociale" que se livrent les Etats d'aujourd'hui... parce qu'ils ont choisi de mettre la "vraie guerre, la guerre armée" hors la loi, au nom du progrès, de la civilisation et de l'humanité ! C'estun sujet cher à notre Président, Bernard Esambert...

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Commentaires

Ces questions sont d'une pertinence phénoménale. Vous tapez en plein dans le mille! Elles interpellent non seulement Luc Ferry mais encore tous les enseignants et tous les politiques.
J'ai hâte de lire les réponses des uns et des autres.

@ Jacques,

Je suis désolé, mais Monsieur Luc Ferry n'a, apparemment, pas souhaité répondre à nos interrogations...

Mais l'espoir est toujours vivant !

HPS

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