Cécité industrielle

A l’heure où les plans sociaux se multiplient et le chômage technique explose, l’urgence d’endiguer la désindustrialisation croissante du pays et  d’en restaurer la compétitivité se fait jour. La création, par le nouveau gouvernement,  d’un ministère du Redressement productif reflète le volontarisme des pouvoirs publics. Mais le défi de la désindustrialisation concerne, aussi et surtout, les entreprises.

Prenons le secteur automobile. Alors que les constructeurs allemands affichent des résultats mirobolants, leurs homologues hexagonaux, en particulier PSA, sont à la peine. Parmi les clés du succès des Allemands ? Une présence sur quasiment tous les segments, des nouveaux modèles fréquents, des innovations continues, sans oublier la fameuse qualité allemande…

Qu’en est-il des Français ? Ils peinent certes à s’imposer dans le haut de gamme. Mais pour le reste, ils n’ont rien à envier aux Allemands sauf … peut-être la capacité à "coller" au marché. Donc aux clients. Une cécité industrielle qui peut coûter cher !

Prenons Peugeot. Quand le constructeur a sorti sa 206 CC, c’était futé : un petit cabriolet pas cher destiné aux célibataires ou couples sans enfant qui n’auraient probablement jamais acheté un cabriolet sans ce modèle.

Quand Peugeot a proposé sa 307 CC, c’était logique : le jeune couple a des enfants qu’il peut soigneusement attacher sur la banquette arrière.

Quand les enfants grandissent, que propose Peugeot ? Rien. Si bien que ceux qui souhaitent continuer à rouler cheveux au vent vont voir la concurrence - quasi exclusivement allemande - et paient le prix fort. Cela tombe bien puisqu’en vieillissant, leurs capacités financières ont augmenté.

Après cela, on s’étonnera que les constructeurs allemands croulent sous la demande et distribuent des primes records à leurs employés quand, dans le même temps, les constructeurs français bradent leurs produits et mettent au chômage technique leurs centres de production.

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Commentaires

Tout à fait d'accord, chère Meriem. L'industrie automobile française est emblématique de la chute industrielle de la France. Je me souviens d'une époque, pas si lointaine, où l'on se moquait de Volkswagen, constructeur automobile quasiment mono produit avec la Coccinelle et on ne donnait pas cher de sa survie. On sait ce qu'il en est devenu. VW a une gamme extraordinaire qui va du quasiment low-cost à l'hyper luxe. Qu'aurait-on dit en France si Renault ou Citroën avait racheté Bentley ? Renault a préféré investir dans Lada... Il fut un temps où les constructeurs français, plutôt que d'automatiser leurs chaînes, firent venir un nombre impressionnant de travailleurs africains, avec toutes les conséquences sociales et politiques que nous connaissons aujourd'hui. Quand Citroën ose baptiser du nom prestigieux DS une gamme purement "marketing", c'est quasiment une insulte à un passé où l'on savait encore innover.

Manque de vision stratégique, remplacée par une "financiarisation" à tout crin.

L'industrie automobile française est symptomatique de la désindustrialisation de notre pays et ce ne sont pas des hommes politiques qui pourront enclencher un redressement. Les Renault, Peugeot, Citroën, n'avaient pas suivi des cours de mathématiques financières mais étaient, eux mêmes ou leurs proches, de vrais ingénieurs dans toute l'acception du terme.

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