Immigration sans tabous

070928-Immigration.jpgDepuis plus de 40 ans, le discours sur l’immigration en France n’a pas varié d’un iota. Le flou maintenu entre immigration légale et illégale non plus. Une loi chasse l’autre – on en est à la 72ème depuis 1945. Et depuis la fin des années 70, elles vont toujours dans le même sens : durcissement, verrouillage, exclusion.

Depuis près de 20 ans, le discours dominant sur la mondialisation "heureuse" prône toujours plus d’ouverture, de concurrence, de dérégulation. Les capitaux, les marchandises et même les usines jouent à saute-frontière sans freins, ni limites. Un jour en Savoie, le lendemain à Timisoara et le surlendemain à Chengdu. Les hommes, quant à eux, sont sommés de "pourrir sur pied". Mais les humains ne sont pas des plantes. Ils ont des jambes. Ils marcheront toujours vers un ailleurs qu’ils espèrent meilleur.

C’est le cas de tous les "illégaux" du monde. En France, ils seraient entre 300 000 et 500 000. Le 20 août dernier le ministre de l’immigration, de l’intégration et de l’identité nationale s’inquiétait de ne pas atteindre les 25 000 reconduites prévues pour 2007. Rythme qui, s’il était tenu et à condition que le stock de sans papiers n’augmente pas, permettrait à la France d’être "libérée" de ses illégaux au mieux en 2020, sinon en 2028. Pendant ce temps, la plupart travaille, consomme, aime, fait des enfants... N’est-il pas temps de remettre tout à plat sans a priori ni démagogie ? Des secteurs entiers – BTP, hôtellerie-restauration, agriculture... – souffrent de pénurie de main d’œuvre. Le vieillissement de la population ne va pas arranger les choses. Régulariser tous ceux qui peuvent bénéficier d’un contrat de travail, quitte à définir une période plancher (par exemple 5 ans) de travail effectif avant l’octroi d’une carte de 10 ans, serait un gage d’efficacité économique – des impôts et des cotisations sociales en hausse – et de cohésion sociale par une meilleure intégration.

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Commentaires

J'ai toujours trouvé aberrant qu'en France un sans-papier n'ait que 2 alternatives pour vivre:
- dans le meilleur des cas, il travaille au noir,
- dans le pire, il vole ou trafique.

Lui laisser la possibilité de travailler en respectant la législation serait un moyen simple et efficace de distinguer les immigrants qui souhaitent pleinement jouer un rôle dans notre société de ceux qui veulent en profiter sans faire d'efforts.

Ce qui me fait enrager, c'est l'hypocrisie du gouvernement actuel : après avoir mis en avant le principe d'"immigration choisie" pour faire campagne, seule la restriction des critères déjà existant (notamment concernant le regroupement familial) et l'augmentation des cotas de reconduites aux frontières ont vu le jour. Mais le flou persiste quant à l'avenir des demandes de régularisation, l'arbitraire continue à faire office de loi et pour ce qui est de "choisir" les immigrés, pour l'instant, il semble surtout qu'on choissise de les renvoyer chez eux...
Le champion de la "valeur travail" ne semble pas vouloir donner leur chance à tous ceux qui ne demandent pas mieux que de venir grossir les rangs des travailleurs, payer leurs impôts et leur loyer et effectivement faire avancer des secteurs où nous-mêmes - bon français de souche - n'avons guère envie d'aller mettre la main à la pâte...

@Meriem : Pourquoi la plupart des grands chantiers, même lorsqu'ils répondent à des commandes voulues par le président de la République ou par le maire de Paris, emploient-ils un grand nombre de travailleurs clandestins ? Pourquoi en va-t-il de même dans d'autres secteurs dont celui de la confection ? Pourquoi ces infractions ne sont-elles que mollement combattues ? Est-ce par peur de pousser à la faillite certaines entreprises ,qui, en raison de leur caractère saisonnier, supporteraient difficilement de payer des salaires égaux ou supérieurs au Smic plus les charges sociales afférentes ? Si oui, quels sont les éléments du choix ? Faut-il, pour des motifs économiques se résigner à l'immigration clandestine ? Ou bien convient-il de handicaper des entreprises des entreprises en employant les grands moyens pour les contraindre à respecter les règles ? Ou bien encore doit-on leur tailler une législation sur mesure afin qu'elles aient le droit d'emloyer des saisonniers à des tarifs réduits ?

J'écrivais ces lignes en 1994 dans mon livre "L'Etat c'est nous", et j'ajoutais :

Poser de telles questions n'a rien de honteux. Il est au contraire indigne de ne pas les poser et de se garder d'agir par simple peur d'éveiller l'hostilité de quelques tenants du désordre établi. La peur du patronat (ou du moins de certaines fédérations patronales) a empêché nos dirigeants successifs de choisir la contrainte. la peur des syndicats les a empêché de choisir la souplesse. Mais leur complicité tacite tenait moins de Machiavel que de Gribouille. Un vrai débat aurait permis de briser les tabous.(...)

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