Long terme et choix démographiques

Coree-EnfantsComment retrouver le sens du long terme ? C'est un des thèmes de réflexion du Club pour 2013. Mais l'avons-nous partout perdu, ce sens du long terme ? Méditons sur l'exemple de la Corée du Sud, comme nous y invite le Financial Times du 3 janvier.

L'investissement des parents coréens dans leurs enfants est immense : un investissement à la fois psychologique et financier. L'article cite un couple dont la moitié des revenus passe  en frais d’éducation de leur enfant et notamment en cours particuliers. 93% des parents veulent au moins un diplôme bac + 4 pour leurs enfants. Le résultat est impressionnant au niveau de la formation secondaire : la Corée du Sud est numéro 1 de l’enquête OCDE Pisa pour les lettres et les mathématiques chez les plus de 15 ans, numéro 3 pour les sciences.

Cette vision longue n’est pas dépourvue d’effets pervers.

  • Le premier est une baisse de la qualité de l’enseignement supérieur coréen face à un tel afflux. On peut penser qu’une demande solvable corrigera cela aisément.
  • Le second effet pervers est que la promesse implicite de statut lié à cet enseignement supérieur n’est pas au rendez-vous : si l’offre d’enseignement supérieur suit qualitativement mal, l’offre de débouchés suit encore plus mal. Cela n’est pas très différent de ce que nous connaissons en France.
  • Mais un troisième effet pervers, plus original, est que cet investissement fantastique dans leur enfant dissuade la majorité des couples d’en avoir un second. La natalité coréenne est tombée au plus faible niveau mondial, à 1,2 enfants par femme, soit nettement moins qu'en Chine avec sa politique de l’enfant unique (à 1,6). La régulation individuelle économico-psychologique est plus puissante que la régulation collective et policière. Ce choix des parents n’étant pas du tout (comme cela semble le cas dans la vieille Europe) une priorité donnée par les jeunes couples aux plaisirs de court terme.

Les autorités coréennes s’affolent … Et on aboutit à une question complexe : sommes-nous face à une contradiction entre une logique individuelle à long terme très rationnelle, mais qui comporte des conséquences collectives suicidaires (l’implosion de la population coréenne) ? Ou est-ce la politique collective de chaque pays (développé) qui est suicidaire, qui considère que « plus on est de fous, plus on rit » ?

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Commentaires

Merci de ton commentaire Meriem.
Pourquoi la chute de qualité dans le supérieur Coréen ? Il semble que le problème soit dans la qualité de l'enseignement supérieur coréen qui n'a pas résisté à l'augmentation brutale du nombre d'étudiants ; et également dans des techniques coréennes d'enseignement hyper-traditionnelles qui marchent mieux dans le secondaire que dans le supérieur.
Pourquoi mon "plus on est de fous, plus on rit"? Parce qu'il me semble que cela résume la politique démographique de la plupart des Etats, qui paniquent quand leur population diminue (et donc défendent une politique de "plus on est de fous..."). Ont-ils raison ? Je ne sais pas. Et en tout cas, comme vous le signalez, cette politique (si tant est qu'elle existe) ne marche pas vraiment dans la plupart des pays d'Europe.

Je suis assez d'accord, cher Jérôme, avec la tonalité générale de l'article. J'aurai toutefois une question et une remarque.

La question est la suivante : comment des jeunes qui sont numéro 1 de l'enquête OCDE Pisa pour les lettres et les maths chez les plus de 15 ans peuvent-ils s'"effondrer" en arrivant au supérieur ?

La remarque concerne votre chute : " Ou est-ce la politique collective de chaque pays (développé) qui est suicidaire, qui considère que « plus on est de fous, plus on rit » ? "

Or, si l'on prend le cas de l'Europe - hormis l'Irlande (2,07 enfants/femme), la France (2,01) et, dans une moindre mesure les pays scandinaves (1,9)- les taux de natalité n' y sont absolument pas florissants et tournent autour de 1,5 enfant par femme en moyenne. L'Allemagne, l'Italie, l'Espagne ou la Pologne sont à 1,4 par exemple.

Ecire de ce fait « plus on est de fous, plus on rit » ? me paraît un peu excessif.

Amitié

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