Etats-Unis/Europe : mêmes causes, effets différents

Tous les Etats occidentaux surendettés sont condamnés à la rigueur mais les Etats-Unis et les pays de la Zone Euro ne sont pas aujourd’hui sur les mêmes barreaux de l’échelle.

Malgré une dette publique plus de six fois supérieure à leurs revenus fiscaux (contre une moyenne d’environ deux fois dans la Zone Euro), les Etats-Unis disposent d’une monnaie, le dollar, dont la survie n’est pas en doute. A l’inverse, selon de nombreux investisseurs, l’avenir de l’euro est en question. Ce décalage est l’une des raisons pour lesquelles les « Treasury bonds » américains ne manquent pas de preneurs.

Le gouvernement fédéral dispose d’une marge de manœuvre suffisante pour donner priorité à la croissance et remettre à plus tard l’exercice de la rigueur. Il calcule que le rebond de la croissance augmentera les rentrées fiscales et qu’au bout du compte, les coupes budgétaires pourraient être relativement douces. Le monde entier aurait intérêt à ce que ce scénario rose se transforme en réalité et que le délabrement des finances locales  ne vienne pas rapidement troubler son déroulement.

En Europe, le rythme est différent. La crise grecque et les menaces qui pèsent entre autres sur l’Espagne obligent à lancer, dès maintenant, des programmes de rigueur. L’Allemagne joue au maître d’école et donne l’exemple. Pourtant, quoi qu’en disent ses détracteurs, elle agit prudemment : les premières économies budgétaires ne prendront effet qu’en 2011. Son ministre des Finances, Wolfgang Schäuble (voir son article dans le Financial Times du 24 juin) estime que le volontarisme affiché pour quatre ans redonnera confiance aux consommateurs et contribuera ainsi à jeter les bases d’une croissance saine. Espérons que ce qui est (peut-être) vrai pour l’Allemagne l’est pour l’Europe entière.

Le principal écueil réside dans la psychologie des peuples. Les Allemands ont été marqués par la terrible inflation de 1923 qui a été la principale cause de leurs malheurs alors que la plupart des autres, à commencer par les Français, ont surtout souffert de la dépression des années 30. Les discours à tenir ne peuvent être identiques si l’on veut que la nécessaire rigueur ne sape pas la confiance au lieu de la restaurer.

Conclusions : a) l’urgence est plus forte en Europe qu’aux Etats-Unis ; b) les « policy mix » européens doivent tenir compte de la psychologie des peuples ; c) les Etats-Unis seront rattrapés par leur endettement. Leur rigueur n’est qu’en sursis.

Share

Commentaires

http://www.abcbourse.com/analyses/chron … e-464.aspx

Economie US : si la voiture boit la tasse, c'est que le bateau coule

Vincent Benard A quoi voit on que les USA vont très probablement s'enfoncer dans une "double dip" récession ?

Pessimisme routinier

Aux inquiétudes de la banque des règlements internationaux, qui, après avoir sorti une étude très pessimiste sur la soutenabilité des dettes publiques, récidive et lance un avertissement sévère (malgré le langage châtié) aux états ? Un extrait :

A l'inverse, les banquiers centraux réunis à Bâle ont souligné l'urgence de mesures d'assainissement des dettes publiques. "Conjugués aux vulnérabilités qui subsistent dans le système financier, les effets secondaires de soins intensifs appliqués sur une période aussi longue ne sont pas sans créer des risques de rechute", anticipe dans son communiqué la banque des banques, qui a jugé qu'un maintien exagérément long des mesures extraordinaires de soutien risquerait de créer des banques ou des entreprises "zombies", trop dépendantes des aides publiques.

Mais ce ne sont que des banquiers centraux, après tout, qui sont ils pour contester la science d'un Paul Krugman ou d'un Joe Stiglitz ?

Peut on craindre le pire en constatant que le stock de maisons à vendre du seul fait des faillites personnelles atteint 16 fois le volume actuel des ventes mensuelles, promettant une nouvelle chute brutale des prix immobiliers (également pronostiquée sur Forbes) à des niveaux jamais vus depuis des décennies ? Bon, vous me direz que ce n'est qu'un indicateur parmi d'autres, et que l'immobilier n'est pas toute l'économie américaine. Certes.

Et vous pourriez encore trouver mille et une raisons d'espérer que malgré tout, un début de commencement de "reprise", malgré la multiplication des Cassandre qui vous disent qu'elle n'est qu'un mirage.

Crédit auto : sur les traces des prêts immobiliers ?

Non, ce qui devrait vraiment faire comprendre à tout le monde que cette fois ci, les USA vont être aspirés au fond du trou, c'est que les américains commencent à faire massivement avec leur crédit auto ce qu'ils ont fait avec leur crédit immobilier : ils laissent tomber, de plus en plus massivement. Ils tentent de revendre leur crédit et leur voiture, au fur et à mesure que leurs indemnités de chômage chutent.

Et si les américains se mettent à abandonner leur voiture, là... Le mouvement est prononcé essentiellement dans les quatre états les plus bullaires (Ca, Az, Nv, Fl), et, Ô symbole décadent, dans le Michigan, berceau de l'automobile américaine.

Si vous voulez faire de bonnes affaires, c'est ici : les prix sont vraiment cassés. Mais évidemment, il vaut mieux habiter là bas.

Blague à part, si le phénomène prend encore de l'ampleur, ce sera une nouvelle source de dégradation des fonds propres bancaires. Qui n'en avaient pas vraiment besoin. Plus l'immobilier commercial. Plus les dettes souveraines. Plus la seconde vague de "resets" de prêts variables...

Châteaux de sable en péril

Il était totalement vain, de la part des gouvernements, de prétendre combattre une crise du surendettement par plus de surendettement. Et nous allons payer très cher l'entêtement des états à vouloir dépenser toujours plus d'argent qu'ils n'avaient pas pour "sauver" le système financier.

Ludwig Von Mises a caractérisé assez brutalement les possibilités de sortie d'une crise de surendettement :

"There is no means of avoiding the final collapse of a boom brought about by credit (debt) expansion. The alternative is only whether the crisis should come sooner as the result of a voluntary abandonment of further credit (debt) expansion, or later as a final and total catastrophe of the currency system involved."

Les gouvernements ont choisi la seconde alternative, en prétendant empêcher l'économie de sombrer. Résultat, la voie d'eau qui nous emportera n'en sera que plus béante.

Vincent Benard

Ajouter un commentaire