Management-Spectacle

Je ne sais pas pour vous, mais moi, la couverture médiatique de la succession de Jean-Marc Espalioux ? la tête d'Accor m'a mis mal ? l'aise.

Comme tout le monde, et notamment l'intéressé, j'ai appris la nouvelle par les journaux, en l'occurrence Le Fig Eco et les Echos. Les deux articles se ressemblaient d'ailleurs. On y annonçait une pré-sélection de 8 candidats, tous issus du Gotha patronal ? forte visibilité: Germond, Pélisson, Giscard ... On se demande ce que Christian Streiff venait faire dans cette liste, si ce n'est rajouter le piment du déj? éconduit. En définitive tout cela ressemblait beaucoup ? la lecture estivale d'un autre grand quotidien, l'Equipe, au moment du Mercato d'inter-saison de foot. On fait des gros titres, de grosses annonces, des unes sur le transfert de Untel ou de Telautre. Ca fait partie du jeu, puisque celui-ci est un spectacle, et que le journal susnommé en tire la matière de ses articles.

Mais l? , on ne parle pas de la même chose. Nous ne sommes pas (nous ne devrions pas être) au spectacle. Nous parlons de la Présidence de l'une des plus belles entreprises françaises, porteuse de plusieurs dizaines de milliers d'emplois, en France et ? travers le monde. Cela se prête mal aux effets de manchette et au tintamarre journalistique. Et cela réveille en moi ce sentiment indicible, mais que semble éprouver un nombre croissant de cadres dirigeants ou supérieurs, d'une caste de plus en plus éloignée de grands patrons médiatiques, véritables acteurs du show-biz, qui tournent de Présidences en Présidences, organisent leur show personnel et leur visibilité dans les médias, interagissent avec ces derniers dans un complexe jeu de renvois d'ascenseur et de promotions croisées.

Ces pratiques sont la règle dans les milieux du show-biz, mais c'est normal, c'est du spectacle. Elles le sont devenues pour le sport. L'idéal de Pierre de Coubertin est révolu depuis suffisamment longtemps pour que personne ne s'en offusque. On sait également ce que cela a donné en ce qui concerne la politique. L'état général de l'opinion publique ? l'égard de nos hommes politiques en dit long sur les erreurs qui ont été commises.

Mais quid de l'entreprise? Peut-on se permettre de prendre le risque de verser dans le Management-Spectacle? N'est-on pas en train de détruire la dernière bribe de respect des Français ? l'égard de notre unique source de création de richesses ?

Votre avis m'intéresse.

PS: je viens de recevoir un message sur mon Blackberry: il parait qu'ils ont trouvé le successeur d'Espalioux: il s'agirait de Zizou! Mais ils hésitent encore avec Beckham...

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Commentaires

Evidemment je ne pense pas qu'on puisse se dire que l'entreprise peut se permettre de verser dans le management spectacle... Mais la question de l'image de l'entreprise, et du rôle que l'image du Président y joue, est cruciale.
Chez Leclerc par exemple, qui est une success story, je pense que MEL passe une grande partie de son temps ? communiquer. Mais avec une ligne de conduite et des risques (dont on pense ce qu'on veut). L'entreprise doit être organisée pour cela : un patron en représentation et une machine qui tourne derrière.
Cela m'évoque aussi une réflexion de je ne sais plus qui : l'égo des patrons est tel qu'ils se réjouissent que l'entreprise se casse la figure après leur départ : "voyez, sans moi"... Le vrai management n'est-il pas celui qui prépare l'après ? Et comment préparer un après dans le système économique actuel ?

La communication financière utilise les même ficelles et les mêmes officines que la communication politique il me semble : c'est tout dire.
Il y aurait beaucoup a dire sur la presse financière et sur ses manipulations : les salariés et les actionnaires d'Enron, de Parmat ou de bien d'autres sont l? pour en témoigner.
C'est tout le système de communication qui est a revoir. Mais attention lorsque l'on pourra entrer dans les cuisines, étudier de prêt certains bilan cel? risque de décoiffer.
La future privatisation d'EDF (et la manière d'évaluer le machin) risque d'être intéressante ? suivre ...

et l'affaire de la plainte déposée par des familles de victimes du tsunami (tout juste avant le conseil qui devait décider du départ de JM Espalioux) n'a pas aidé....
Cet article publié par Renseignement Economique penche pour cette théorie : "de mars ? ce jour, on compte 2575 articles citant Accor, soit une moyenne de plus de 14 articles par jour. Or le 8 mars, près de deux cents articles citent le titre hôtelier, dont 40% sont publiés hors de France. Une partie de ce volume s'explique par la communication des résultats annuels. Mais le reste est animé, pour plus de 30%, par les plaintes déposées par des familles européennes contre Accor qui aurait construit un hôtel en Thaïlande sur une zone sismique et n'aurait pas engagé tous les moyens pour retrouver ses clients tués par le Tsunami. C'est sans doute cette mauvaise image reprise par les médias en juin et en juillet qui alimenterait le bien-fondé des actionnaires fondateurs, Dubrule et Pelisson, pour demander la démission de Jean-Marc Espalioux."

je rebondis sur le commentaire de Adam:
bien évidemment, il faut que le patron d'un grand groupe côté fasse que le groupe existe, et pour cela, il faut communiquer. Mais la communication doit être faite au profit du groupe, pas de l'individu, et j'aime beaucoup votre commentaire "voyez, sans moi" qui en a poussé plus d'un ? retarder le moment où il ferait le combat de trop.
Pour la mise en scène du patron, ce n'est pas un problème, tant qu'elle ne finit pas par releguer les n-1 de celui-ci au rang de sous-fifres incapables d'aller plus haut, plus loin. Je ne sais pas ce que pensent les patrons de branches chez Accor, ou leurs collaborateurs directs, mais ce que je déduis de mes lectures, c'est qu'il n'y en a pas un ? même de relever le défi de cette entreprise. Motivant pour la suite...
Tiens, j'ai entendu sur Europe 1 que c'était l'hypothèse Beckham qui tenait la corde en ce moment...

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