La tyrannie de l’apparence

Hagege.jpgUn conseiller du Prince doit oser déconseiller le Prince … et un chirurgien esthétique s’interdire de pratiquer certaines opérations. Jean-Claude Hagege, expert près de la Cour d’Appel, est intervenu mercredi 12 décembre, sur le thème : « La tyrannie de l’apparence ».

L'image de la Beauté actuelle a changé en 20 ans. Comment réagit le public face à la tyrannie de la Beauté ? Pourquoi certains y succombent, et d'autres en sont indifférents ? 

Chirurgien Plasticien et Esthéticien depuis plus de 20 ans, Jean-Claude Hagege a découvert que les vrais sourires reflètent les vrais bonheurs et que la joie de vivre ne s’achète pas. Il en a tiré quelques leçons. 

Membre de la Société de Chirurgie Plastique et Reconstructrice et Esthétique et de l’International Society of Aesthetic Plastic Surgery, expert près la Cour d'appel de Paris depuis 1995, Jean-Claude Hagege est l’auteur de plusieurs ouvrages dont Le pouvoir de Séduire (Editions Odile Jacob, 2003) qui a été traduit aux Etats-Unis.

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Commentaires

Sujet passionnant mais Est ce ouvert au public ?
Bien à Vous. Maud

J'aurais bien aimé assister à cette conférence...
Pour ma part, je crois comme les anciens que ce qui est Bon est Beau.
"Avoir une bonne tête" n'est pas loin de ça. Il me semble que la "beauté" intérieure devrait se refléter sur la "beauté extérieure". C'est souvent le cas. Mais ce dont il s'agit là n'est pas de même nature. Cette beauté là n'est pas tyrannique; elle est apaisante et chaleureuse.

La beauté qui est l'instrument d'une mode ou d'un engouement passager, qu'ils soient le fait d'une petite élite que les autres prennent en exemple, ou le fait d'un groupe d'influence qui créée ainsi les moyens de sa puissance économique,cette beauté là est forcément "tyrannique". Elle fera mal à tous ceux qui ne satisfont pas "immédiatement" ses canons !

C'est là le moteur du commerce de tous temps : créer une frustration chez le client de manière à ce que qu'on lui propose d'acquérir en soit le remède...

Comme l’a remarqué Wolfgang Michalsky lors du petit déjeuner du 12 décembre, la « tyranie de l’apparence » qui caractérise notre époque peut être expliquée par plusieurs tendances sociologiques. Sans se lancer dans une analyse exhaustive, on peut tout de même en citer trois.

Les comportements sont de plus en plus « corporalisés »
Depuis 20 ans, dans un monde où 80% de la population vit en ville, le nombre d’échanges et d’interactions entre individus a cru de manière exponentielle. Nous côtoyons beaucoup plus de personnes qu’auparavant et beaucoup plus de corps souvent différents. Si bien que notre sensibilité au comportement de l’autre s’est accrue au point que nous l’interprétons en permanence de manière de plus en plus fine, sans forcément en avoir conscience. Ainsi, les comportements nous étant de plus en plus sensibles dans leur dimension corporelle, nous accordons une importance grandissante à l’apparence et au « soin des apparences ».

Le corps est l’objet de nouvelles exigences
Une longue évolution, liée en partie au développement des professions du secteur tertiaire, a entraîné l’individu à prendre conscience du fait qu’il pouvait adopter une attitude d’exigence envers son apparence. Cela notamment parce qu’elle devenait, par des métiers « moins physiques » et plus « relationnels », une interface plus complexe. Ces nouvelles exigences sont : l’obsession du corps actif (dans l’action, en forme, solide), la recherche du standard (pour être dans la norme) et du détail qui fait la différence à la marge (pour exister soi-même à travers un détail vestimentaire ou une couleur de cheveux, etc.), l’obsession de la maîtrise de soi (« il faut que je me reprennes, que je fasse du sport », « rester jeune, dans le corps et dans l’esprit », « être ouvert dans son attitude » ; etc.).

L’apparence expression de « l’harmonie de vie »
Le corps devenant progressivement un vecteur privilégié de nos exigences personnelles et une interface mieux perçue par les autres, il est amené à exprimer la part la plus vivante de notre identité individuelle : la manière dont nous changeons, dont nous évoluons individuellement. Notre apparence exprime la manière dont nous « prenons la vie » à un moment donné de notre existence. Et la période de vie qui est probablement la plus marquante sur ce point est le début de la retraite. Car l’apparence y devient l’enjeu crucial : Est-on usé par le travail ou rajeuni par l’horizon d’une nouvelle vie ? Est-on encore actif ou serein et disponible ?

Pour conclure, il apparaît que les risques sociologiques de la tyrannie de l’apparence sont essentiellement de deux ordres :

a) soit l’exigence d’une apparence parfaite conduit l’individu à dévoyer son identité et sa psychologie (par exemple les jeunes filles anorexiques pour ressembler aux mannequins ou qui portent un string dès l’adolescence pour vieillir leur apparence et imposer via leur corps une autre image d’elle-même).

b) soit les jeux de l’apparence physique conduisent un groupe à détourner les valeurs collectives de la représentation et de l’intégrité du corps (par exemple le porno-chic qui chosifie l’humain en l’esthétisant à outrance, ou sur un autre plan le voile islamique porté comme un signe qui résume et protège en même temps la place des femmes dans la société).

Au-delà des craintes que l’on peut nourrir sur l’avenir, il ne faut pas oublier que les cinquante dernières années ont permis, en Europe du moins, que les gens découvrent qu’une apparence pouvait être choisie et non simplement reproduite selon la tradition. C’est tout de même un mieux…

Le dicktat de l'esthète sans éthique !! Vaste sujet ...

Des seins, des lèvres... et de la silicone/Posté le 20 octobre 2005 (http://www.clubdesvigilants.com/archives/2005/10/des_seins_des_l.php)

Combien de gamines, de femmes (jeunes et moins jeunes) et d’hommes (des hommes de plus en plus nombreux à rejoindre les rangs !) ont succombé au mirage du « faux semblant qui ressemble au vrai » ? Les médias, la société du bien pensé – looké, relooké, fashionnisé, lobotomisé par les TV/LCD/DVD/ETC, mesuré, emballé, c'est pesé ! – ont su imposer le diktat des « esthètes sans éthique ».

Cela fait des ravages y compris dans les cours d’école maternelle où des midinettes, hautes comme trois pommes, veulent gober des sachets minceur pour faire comme leurs mamies ou leurs taties (lesquelles sont dans une nouvelle « phase de sveltessitude intensive »). J’ose espérer que mon enfant sera épanouie et conservera, toute sa vie, sa dignité. Restons qui nous sommes, restons ce que nous sommes, ne nous dénaturons pas !

N'ayant pas pu assister à ce débat tout comme Gilles Mas, j'en venais cependant à me poser la question de savoir si il avait été évoqué le sujet de l'impact des NTIC sur l'apparence , et plus particulièrement ce nouveau phénomène constitué par les mondes virtuels.

Les blogosphères et réseaux sociaux, mais encore plus les nouveaux mondes virtuels (Second Life, World of Warcraft et consorts) permettent à chacun de se faire représenter de manière totalement différente de son apparence réelle. Par le biais d'avatars, de clichés, de dessins ou de symboles il est possible de s'insuffler un nouveau visage, et de rendre beau celui qui se trouve laid, ou vice-versa.

C'est, finalement, un pendant de la chirurgie esthétique (rendant à l'individu un service, puisque lui permettant de se mettre "dans la peau" du personnage rêvé depuis toujours), à cela près que tout est virtuel, donc sans impact ni conséquences sur la vie de la personne...

Sans conséquences, c'est du moins ce que la plupart de ces cyber-citoyens imaginent. De plus en plus de sites spécialisés (à l'instar de spock.com) permettent de relier les différentes facettes d'un même individu afin d'en dresser un portrait unique, quelle que soit son activité sur la toile numérique. Cela risque de rendre certains suscpicieux.

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