France

Olivier Roy : "L'islamisation de la radicalité"

Face à une opinion dominante en France selon laquelle l’islamisation produit du terrorisme, fortement portée par le très médiatique Gilles Kepel [i] et sa « radicalisation de l’Islam », Olivier Roy, philosophe persanophone et politologue spécialiste de l’Islam, aujourd’hui professeur à l’Institut universitaire européen de Florence (où il dirige le Programme méditerranéen), défend l’idée d’une « islamisation de la radicalité » [ii] [iii]. Il fonde son analyse sur l’évolution du profil des auteurs d’attentats terroristes. Pour résumer, depuis 25 ans il y a une continuité dans ces attentats, qui

Une autre manière de regarder le Ségur de la santé

Notre santé n’a pas de prix mais elle a un coût, comme chacun sait ou plutôt croit savoir vaguement. Qu’il s’agisse d’augmenter les rémunérations des soignants ou le nombre de lits de réanimation ce coût concerne tous les patients que nous sommes. Que nous le payions sous forme de cotisations facultatives (mutuelles complémentaires), obligatoires (cotisations maladie) ou indirectes (CSG, CRDS, etc.) nous le payons tous de manière assez égalitaire. Toutes ces contributions sont en effet peu progressives. Ce coût il serait bon que nous en ayons mieux conscience, individuellement et

La taxe carbone, une solution inefficace et dangereuse

Un Dictionnaire des idées reçues contemporaines comporterait un article ainsi rédigé : « Taxe carbone : Être pour, car c’est la seule solution au réchauffement climatique. Regretter que le gouvernement soit trop veule pour la mettre en place. » Cette idée reçue est répandue, fausse et dangereuse. Pour simplifier, concentrons-nous sur le pétrole, notre principale consommation générant des gaz à effet de serre. Les gouvernements sont moins veules que prudents lorsqu’il s’agit d’augmenter des taxes sur des produits essentiels, et à juste titre parce qu’elles sont injustes. Elles portent en effet

Est-il encore possible de créer du lien dans une société fragmentée ?

Cette Matinale a été plutôt orientée vers les causes de la fragmentation que les possibilités de recréer du lien entre les différentes îles françaises Première cause de cette "archipélisation" de la société, la disparition de la matrice structurante « catho-laïque ». Le déclin du catholicisme commencé dans les années 60 est désormais avéré. Cela se traduit par une baisse des pratiques religieuses (seuls 6% des catholiques vont à la messe tous les dimanches en 2012 vs 35% en 1961), une perte d’influence culturelle du catholicisme mais aussi par des basculements civilisationnels du référentiel

Le CESE, incubateur de démocratie participative

Le Conseil Economique Social et Environnemental - CESE, troisième assemblée constitutionnelle française, est peut-être en train de changer le visage de notre « vieille » démocratie sans que beaucoup en prennent pleinement conscience. Cette institution encore trop méconnue a en effet engagé depuis quelques années un processus susceptible de métamorphoser notre vieille « démocratie représentative, bureaucratique et hiérarchique » évoquée par Alain de Vulpian dans « Eloge de la métamorphose ». Le CESE a été conçu dès le départ pour constituer le trait d’union entre la « société civile organisée »

Rwanda : la question de la bêtise

Faudra-t-il attendre vingt-cinq ans de plus pour que les autorités françaises consentent à s’exprimer en responsabilité sur le rôle joué par la France au Rwanda avant et pendant le génocide des Tutsi en 1994 ? On peut le redouter tant les exemples historiques tendent à montrer que deux générations, au moins, sont nécessaires. La reconnaissance des crimes de Vichy (50 ans), récemment la vérité sur l’affaire Audin (50 ans) ou encore les déclarations du président de la République d’Allemagne sur la responsabilité de son pays dans le génocide des Arméniens (100 ans), souvent citées comme les

Après le Grand débat ?

Hervé Chaygneaud-Dupuy, spécialiste de l’innovation sociétale et de la prospective, auteur de « Citoyen pour quoi faire ? Construire une démocratie sociétale », paru en 2016, a écrit cet article pour son blog où il livre régulièrement ses observations sur la vie politique française. Ses réflexions et propositions nous semblent particulièrement intéressantes à relayer, en écho avec les réflexions du Club autour de l'enjeu « rénover la démocratie ». Deux mois de Grand débat, un mois pour tirer les conclusions : la presse trouve le temps long ! Que l’on sorte pour une fois de la précipitation

Raymond Aron pour y voir clair

Récemment Raymond Aron était à la une d’un grand hebdomadaire et un Abécédaire vient de lui être consacré par les éditions de l’Observatoire. Rien d’étonnant dans cette capacité à faire l’actualité dans le contexte de crise que nous connaissons : Aron s’est inlassablement interrogé sur les grands problèmes du pouvoir et de la démocratie, sous leur forme historique et éternelle. La société industrielle fut son moment historique. Il aurait été passionné par l’ère digitale et mondialisée, notre moment, où les problèmes éternels mutent dans des formes nouvelles qu’il nous importe de comprendre et

Réinventons la démocratie pour ne pas céder au désarroi !

Ce ne pourrait n’être qu’une surprise, à la fois bonne et mauvaise, c’est de l’inédit en tout cas. Quelques centaines de milliers de Français, qui souffrent dans leur vie quotidienne et se sentent ignorés de ceux « d’en haut » expriment leurs souffrances par des manifestations répétées et crient leurs revendications. Signe que ces Français ne sont pas des « veaux » enfermés dans leur individualisme, qu’ils croient à la politique, qu’ils veulent la réinventer. Toute demande de changement venant de la base est à prendre au sérieux dans une démocratie, même si elle engendre désordres et

Macron, le bouc émissaire ?

Pour comprendre la crise des gilets jaunes en ce début décembre, le plus utile ne serait-il pas de relire « Le bouc émissaire », de René Girard ? Pour échapper à la contagion de la violence et à l’autodestruction, nous dit le philosophe, les sociétés recherchent une victime expiatoire, un bouc émissaire qui sera injustement sacrifié. Le « tous contre un » neutralise la violence et parvient à rétablir la concorde au moins un temps. La victime choisie doit être assez loin du groupe, à la fois différente (c’est un bouc) et semblable (il est parmi nous). Elle présente souvent des qualités extrêmes