Politique

Foule, idées communes et autorité

Jacques Blamont souhaitait intituler l’un de ses derniers livres, consacré à l’intelligence collective à l’heure des réseaux sociaux, Je suis la foule. L’éditeur préféra un plus sage Réseaux ! La qualité de l’ouvrage [1] était intacte mais il me semble que Blamont capturait dans ces quatre mots la force d’une révolution qui, de technologique, est devenue anthropologique et politique. Cette foule-internet a autant de puissance et de force transformatrice que la foule-démocratie portée par l’égalité jadis observée par Tocqueville. Une différence est que l’information y circule immédiatement ; c

Libye : 2021, année de tous les espoirs après des années de chaos

Le professeur Alaya Allani est historien chercheur universitaire (Histoire contemporaine et du temps présent) à l’Université la Manouba à Tunis. Il a réalisé et publié de nombreux travaux sur l’Islamisme et le Salafisme en Afrique du Nord et au Proche Orient et participé à de nombreuses conférences en Europe (Austrian Study Center for Peace and Conflict Résolution, Vienne Novembre 2017), Paris (Center for Mediterranean Intégration - Mai 2015), Tokyo (Mars 2014). Il a bien voulu répondre aux questions du Club des vigilants sur son appréciation de la situation actuelle en Libye, à un moment où

Cédric Villani. Science(s), Politique … et Société : des relations complexes

Scientifique mondialement connu depuis la médaille Fields qu’il a obtenue en 2010, personnalité atypique de l’univers politique français, Cédric Villani est un « conteur » [i]. Ce qu’il aime, c’est raconter des histoires qui parlent aux gens, à leurs émotions, avant de s’attacher à « démontrer techniquement » quoi que ce soit. C’est ainsi qu’au début de son intervention (Cédric Villani intervenait lors d’un webinaire du Club intitulé : Science et Politique, un mariage impossible ? ») il nous a d’abord longuement décrit, lui qui a toujours œuvré dans sa carrière scientifique pour un «

Guerre des vaccins : gouverner c'est agir !

Les premiers jours, cela pouvait s’interpréter comme des maladresses ou des erreurs de communication. Aujourd’hui, le doute n’est plus permis. La « guerre » des vaccins a commencé par une accumulation d’erreurs. - Nomination d’un éminent professeur Nimbus comme coordonnateur en chef qui reconnaît naïvement que la logistique n’est pas son affaire. Le khâgneux Emmanuel n’a-t-il pas appris que la logistique est la variable décisive dans toute guerre ? La supériorité des armées napoléoniennes est due pour une grande part au fait que personnellement Napoléon s’occupait avant le lancement d’une

Adieu les cons, transhumance suicidaire ? Albert Dupontel

Belle interview d’un artiste humaniste qui fait preuve d’une capacité rare de compréhension des « émotions populaires » que beaucoup de nos politiques pourraient (devraient) lui envier. Esprit critique et anxieux face aux évolutions du monde actuel, grand lecteur et cinéphage (l’interview fourmille de références), Dupontel est amené à parler aussi bien du « chaos géopolitique » que de « la parole médiatique » (« aux mains de peu de monde, et ça se voit »). #MeToo, les Gilets jaunes, Black lives matter ? Des « paroles d’opprimés face à des oppresseurs », différentes expressions pour lui de « l

Un nouveau monde, vraiment?

Les partisans de la décroissance, de la démondialisation et de l’effondrement jubilent. Le coronavirus leur donnerait raison et nous avons eu tort de ne pas écouter Cassandre. Tout ne sera-t-il plus comme avant ? Probablement pas mais certaines inflexions sont nécessaires. Il est hasardeux d’affirmer que nous vivons un moment inédit. Qu’il le soit pour nous, enfants de la paix et de la santé pour tous est certain, mais à l’échelle des temps, les grandes épidémies ont prélevé leur dû et il est utile d’en rappeler le mécanisme et les conséquences. La mondialisation n’est pas un fait nouveau. La

Le CESE, incubateur de démocratie participative

Le Conseil Economique Social et Environnemental - CESE, troisième assemblée constitutionnelle française, est peut-être en train de changer le visage de notre « vieille » démocratie sans que beaucoup en prennent pleinement conscience. Cette institution encore trop méconnue a en effet engagé depuis quelques années un processus susceptible de métamorphoser notre vieille « démocratie représentative, bureaucratique et hiérarchique » évoquée par Alain de Vulpian dans « Eloge de la métamorphose ». Le CESE a été conçu dès le départ pour constituer le trait d’union entre la « société civile organisée »

Débat public, la leçon de Rousseau

Dans la troisième Rêverie du promeneur solitaire Rousseau revient sur l’élaboration de ses idées. Il évoque un assentiment intérieur : il est dans le vrai parce qu’il voit que ses idées sont justes, au sens de la justice et de la logique. De cette façon il soustrait sa réflexion (et sa sensibilité exacerbée) au débat public dont il fustige l’inanité et la méchanceté stérile, un débat où dominent des égos indifférents à la recherche de la vérité. C’est parce qu’il sut préserver sa vérité intérieure de la stérilité ambiante que Rousseau put produire son grand système. On lui doit la révolution

L’Algérie de demain devra compter avec les islamistes

L’Algérie vit un « moment historique » depuis que le 22 février des foules d’Algériens ont commencé à descendre pacifiquement dans la rue, vendredi après vendredi, pour demander une vraie démocratie et la fin du système qui gère le pays depuis des décennies. Le Club des Vigilants a eu la chance de pouvoir en discuter le 17 juin (après le 17 ème vendredi de manifestations !) avec Akram Belkaïd, journaliste (au Monde diplomatique et au Quotidien d’Oran notamment) et écrivain ( L’Algérie, un pays empêché, en cent questions - Ed Tallandier). Il est né en Algérie et y a fait ses études. Jamais la

Raymond Aron pour y voir clair

Récemment Raymond Aron était à la une d’un grand hebdomadaire et un Abécédaire vient de lui être consacré par les éditions de l’Observatoire. Rien d’étonnant dans cette capacité à faire l’actualité dans le contexte de crise que nous connaissons : Aron s’est inlassablement interrogé sur les grands problèmes du pouvoir et de la démocratie, sous leur forme historique et éternelle. La société industrielle fut son moment historique. Il aurait été passionné par l’ère digitale et mondialisée, notre moment, où les problèmes éternels mutent dans des formes nouvelles qu’il nous importe de comprendre et