Démocratie

Veut-on encore être gouverné ?

Les concerts de casseroles résument désormais une profonde crise politique et sociale dont on retiendra que la cause immédiate fut la réforme des retraites. Reste à en saisir les causes profondes, au-delà des idiosyncrasies françaises et du « c’est la faute à Macron », argument qui, s’il n’est pas sans fondement, ne suffit pas à l’explication. Quasiment partout, les institutions du monde libéral perdent en efficacité. Elles sont moins « fluides » et semblent davantage crisper que réconcilier. Quelque chose dans la société leur échappe qu’elles ne parviennent plus à amalgamer, à synthétiser, à

Contre les referendums

À la faveur des débats et manifestations contre la réforme des retraites en France voici mon « coming out » : bien que très attaché à la défense de la démocratie, des libertés et de l’État de droit je crois que le référendum est une fausse bonne idée. J’imagine ce que cette affirmation peut avoir de choquant pour tous ceux qui, logiquement, y voient une rare occasion d’expression démocratique directe du peuple. Comment tenter de justifier cette position dans laquelle entre, je dois l’avouer, une part d’intuition ? Une partie non négligeable de la mission non dite ou peu dite de l’État, donc du

Ukraine, à la fin ce sont les démocraties qui gagnent

Le pouvoir russe n’a pas renoncé à ses buts maximalistes. Il veut soumettre l’Ukraine. Si ça ne fonctionne pas, il la détruira. La propagande, toujours habile à renverser les responsabilités, explique que les Ukrainiens n’ont qu’à se laisser faire et que les Occidentaux prolongent leurs souffrances en livrant des armes, comme la victime d’un viol prolonge ses souffrances en résistant. Les connaisseurs du poutinisme ont largement décrit sa nature criminelle dont le viol est une des facettes [1]. Elle est l’une des raisons pour lesquelles une victoire de la Russie est devenue impossible, dans le

Résilience démocratique

Il y a deux ans, les démocraties occidentales paraissaient poussées vers un déclin inexorable. Prises au dépourvu par la pandémie du COVID elles se battaient entre elles pour obtenir de précieuses cargaisons (masques, respirateurs et autres principes actifs) venues d’une Chine disciplinée qui soulignait à l’envi le chaos occidental. Les démocraties illibérales, Hongrie en tête, s’engouffraient dans la brèche géopolitique et claironnaient la supériorité des vaccins russe et chinois pour ajouter à l’humiliation. Trump récoltait 74 millions de voix, manquait de peu sa réélection et imposait son

Ukraine, comment vaincre la résistance de Poutine à la modernité ?

Les analyses abondent et convergent pour dire que Poutine s’enfonce dans la guerre. A défaut d’avoir l’initiative miliaire, il pousse les feux sur les fronts de la guerre hybride (pseudo-annexions, menace nucléaire, gazoducs/ énergie) qui ne peuvent rien si ce n’est aggraver sa fuite en avant. Sur le terrain les choses accélèrent. L’armée ukrainienne avance avec détermination et efficacité, elle pousse l’armée russe dans la spirale de l’échec, c’est-à-dire l’accumulation de mauvais réflexes et d’erreurs. Le pari de la mobilisation est douteux. Dans La conduite de la guerre [1], le major Fuller

Elections australiennes : résultats et enseignements

Nous pourrions envier le taux de participation aux élections fédérales australiennes, il a dépassé les 92%. Il est vrai que le vote est obligatoire depuis 1924 et qu’avec cette obligation les Australiens semblent se souvenir d’une évidence : la démocratie ne s’use que si on ne s’en sert pas ! Le scrutin renverse la majorité national liberal aux affaires depuis neuf ans (trois mandats). La victoire revient au Labor d’Anthony Albanese qui obtient de justesse la majorité absolue à la chambre basse (77, +8 élus), condition pour gouverner dans cette démocratie parlementaire [1]. La défaite est

Liban : la fin du printemps ou enfin une lueur d’espoir ?

Le 15 mai dernier ont eu lieu au Liban des élections législatives sous tension, dans un contexte de crise aiguë qui s’éternise depuis plus de deux ans, sur fond de faillite économique, de corruption politique, de misère sociale et de conflits confessionnels. Qualifiée de « printemps arabe à retardement », la révolution d’octobre 2019 portait pourtant les espoirs d’une population qui, excédée par les abus de la classe dirigeante, était massivement descendue dans la rue, exigeant la démission de ces hauts responsables corrompus et ayant mené le pays à la banqueroute, suite aux larges dérives

Macron. Prendre son temps.

Le choix d’une équipe ne se fait pas en une semaine. Connaissez-vous une institution, entreprise ou association, dont le président soit tenu de nommer un nouveau DG et l’équipe qui l’entoure en moins d’une semaine ? Aucun choix n’est plus délicat que celui des hommes, qui doit être associé à une mission précise. Il faut discerner les compétences et les caractères, éliminer les caractériels et les dangereux, pressentir les incompatibilités. Tous ceux qui ont exercé des responsabilités ont fait l’expérience de décisions hâtives et imprudentes qu’ils ont longtemps regrettées. Sauf catastrophe

Et dans cinq ans ?

On a eu un peu peur en 2017, on a eu très peur en 2022 et on a toutes les raisons d’être angoissé pour 2027. Peur de l’extrême droite ? Du populisme ? Du national-socialisme ? Peur d’un mouvement dangereux pour la démocratie, incarné aujourd’hui par Marine Le Pen, qui se sera sans doute recomposé d’ici là. Qu’elle, ses amis et ses semblables aient envie de prendre le pouvoir par les urnes ne rassure pas quant à leur attachement à la démocratie. Mussolini et Hitler l’ont fait jadis. Leur ami Orban vient de le refaire en Hongrie. Le quitteraient-ils quand la faillite de leur programme serait

Bruno Piriou : être maire en 2022

La société française bouge beaucoup, le pays est en profonde transformation. Qu’est-ce que son expérience de la politique et du "terrain" enseignent à Bruno Piriou, maire de Corbeil-Essonnes, sur le rôle d'un maire aujourd’hui ? Ce qu’il évoque en premier est le phénomène de déstructuration de la vie politique française. En quelques décennies on a assisté à la quasi disparition des corps intermédiaires classiques (partis politiques, syndicats, associations). Le maire, lui, est toujours là et se retrouve ainsi en quelque sorte en ligne directe avec les habitants. Pour Bruno Piriou ceci fait