La Langue de Zemmour

Professeur à l’université de Stanford (États-Unis), chercheuse associée au Cevipof de Sciences Po, Cécile Alduy s’est penchée sur les procédés rhétoriques du candidat aux élections présidentielles Éric Zemmour, dans un essai bref et incisif, La Langue de Zemmour (Éditions du Seuil, 2022).

Elle montre que son style s’inscrit dans une longue tradition de la langue fasciste.

Disséquant le discours du candidat à la magistrature suprême, elle montre les procédés par lesquels il clôt toute discussion : la répétition à outrance et l'assertion de vérités générales (« on sait que », « depuis la nuit des temps », « c’est toujours »…) qui, de ce fait, deviendraient « naturelles » et non discutables.

Dans le dernier livre de Zemmour (« La France n'a pas dit son dernier mot », publié aux éditions Rubempré), Cécile Alduy souligne la violence qui sature le texte traduisant sa vision des rapports humains excluant l'égalité, le respect, la coexistence entre les sexes, les peuples, les individus.
L'auteur semble développer une fascination morbide pour la guerre, la mort, la conquête et la domination, le mythe du chef charismatique : « Guerre » serait, selon Cécile Alduy, le troisième substantif le plus utilisé par Éric Zemmour, et il côtoierait « mort », « ennemi », « peur », « combat ».

Elle pointe également la manière d’utiliser les guillemets ironiques pour discréditer les mots mêmes, et donc les valeurs, des adversaires. Par exemple mettre « égalité hommes-femmes », « discriminations », « violences policières » ou « État de droit » entre guillemets, comme si ces mots étaient risibles, ne désignaient rien de véritable et qu’on devait s’en moquer et les désacraliser.

Elle dénonce le « processus d'emprise par les mots ». Ainsi lorsqu’il évoque les attentats de Mohammed Merah, Éric Zemmour met sur le même plan et dos à dos victimes et terroriste, tous mis « dans le même sac » sous le même terme plein de haine dans sa bouche – celui d’« étrangers ».

Elle conclut en affirmant qu'il est temps de « refuser de céder la moindre virgule, le moindre mot à cette entreprise d’exténuation du langage et d’assèchement des cœurs ».