Le syndrome de Georges Marchais

Georges Marchais fut un homme politique français qui avait démarré sa carrière syndicale, puis politique après la deuxième guerre mondiale passant par la CGT puis le Parti Communiste dont il fut Secrétaire Général jusqu’en 1994. Remarquable débatteur, en particulier à la télévision, sa célébrité dépassa largement son camp idéologique. Ses formules et messages en firent la voix emblématique de la gauche française jusqu’à la renaissance du Parti Socialiste sous la conduite de François Mitterrand. En dehors des formules célèbres du genre « Taisez-vous Elkabbach », cet homme a eu, durant toutes ces années, un message annuel quasi unique : « cette année, une fois encore, la situation des français s’est détériorée par rapport à l’année précédente, comme d’ailleurs l’année passée ».

Et pourtant, il a démarré sa carrière politique au tout début des « 30 glorieuses », période de prospérité en France s’il en fut, laquelle a été suivie de 20 ans supplémentaires de croissance à 2% et plus, ininterrompue, jusqu’à sa retraite politique de fait. Le PIB français par habitant qui tournait aux environs de 4500 dollars avant-guerre, est passé d’après l’OCDE de 3 819 entre 1946, conséquence de la guerre, à 19 955 en 1995 ! Pour simplifier, le niveau de vie moyen des français a été multiplié par cinq en cinquante ans. Et pourtant quelqu’un a pu affirmer au vu et au su de tous, sans être immédiatement contredit et mis au pilori que le niveau de vie avait diminué chaque année ! En fait, 2 années sur cinquante ont connu une légère régression : 1975 et 1991. Plus concrètement, le français de 1945 vivant dans une chambre avec l’eau sur le palier, un vélo et 15 jours de congés payés, vivait en 1995 dans un appartement, avec une voiture et 4 à 5 semaines de congés, parfois plus. Tout ceci sans même évoquer l’évolution de l’espérance de vie et autres bienfaits de la société de consommation. Dans le même temps, la répartition de la richesse a vu l’indice de Gini français passer de 0,50 à 0,30, divisant par 2 ou presque les écarts de revenus entre ces mêmes français, ce qui reflète sans aucune contestation possible la diminution drastique des inégalités. Et pourtant un nouveau chantre du catastrophisme, j’ai nommé M Thomas Piketty, fait la une des journaux alors que M Jean Tirole, tout de même prix Nobel d’Economie, est considéré avec condescendance car il a, globalement, observé et accepté la fantastique puissance et réussite de l’économie libérale, voire a participé à son amélioration. Pour information, en parallèle, le pourcentage de pauvres dans le monde selon la définition de l’ONU, n’a jamais été aussi bas, et l’objectif de recul de la pauvreté dans le monde fixé pour 2015 a été atteint en 2013 ! Quelles conclusions tirer de tout cela ? La première est que les faits sont une chose et la perception une autre : le catastrophisme et la récrimination font recettes comme les crimes et les attentats en matière de journalisme. Ce ne serait pas grave si cela ne nous amenait pas à des choix politiques qui vont quasi systématiquement à l’encontre des décisions susceptibles d’améliorer la situation économique et en particulier le chômage, pourtant plaie principale de notre système de développement. Une large partie de l’opinion publique, en gros la gauche, n’a de cesse que de casser ou au moins enrayer le bon fonctionnement de la machine qui la fait vivre ! Alors qu’un travail collectif d’amélioration et de mise au point serait bien entendu le bienvenu et bénéfique pour tous. Cette « machine » est loin d’être parfaite, tout le monde en convient, encore faut-il la laisser fonctionner et ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain. Observons plutôt comment s’y prennent les allemands, ou d’autres pays étrangers qui ont mieux réussi que nous. Une autre explication serait tout bonnement l’envie. L’égalité ne peut s’atteindre que par l’alignement, voire le nivellement. Deux solutions sont possibles : par le bas ou par le haut ? Il est clair que par le bas est moins difficile. Si atteindre l’égalité consiste à rendre tout le monde pauvre, la solution est à portée de la main. Ce n’est tout de même pas très enrichissant. Dois-je considérer que mon voisin, riche, m’a volé ? Ou bien dois-je essayer de devenir comme lui ? Au passage, la nature a donné à certains des yeux bleus, à d’autres bruns : devons-nous, par égalité, aligner également la couleur des yeux et si oui, sur laquelle ? Le vrai problème n’est en fait pas là mais dans notre aveuglement idéologique permanent : au lieu d’observer des faits et d’en sortir une théorie, nous inventons des théories que nous justifions ensuite non par des observations contradictoires mais par des affirmations péremptoires, façon Georges Marchais. Qu’on le veuille ou non, la révolution industrielle et le capitalisme libéral ont amené l’humanité à un niveau de bien-être matériel moyen inconnu historiquement et inespéré, même s’il a égratigné la planète. Les migrants le redisent chaque jour avec leurs pieds. Que cela pose des problèmes de généralisation et de continuation certes, mais, par pitié, ne cassons pas, perfectionnons et améliorons ! Il y a encore à faire.    

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Commentaires

En politique, est il plus "payant" d'être cacique (ou critique) que d'être rassurant ?
Tout dépend de la situation électorale du politicien, dont le seul objectif est d'être élu et de rester au pouvoir.
Georges Marchais était aussi l'auteur de la formule célèbre : "le bilan du communisme est globalement positif".

Tout cela pour constater une nouvelle fois que notre démocratie se nourrit plus de démagogie que de réalisme. A quand la responsabilisation des experts et faiseurs d'opinion ? Quand on aura trouvé le moyen de récompenser ceux qui auront parlé "vrai" et sanctionner ceux qui auront "menti".

Il est en effet patent que le niveau de vie moyen des pays industrialisés acteurs du boom économique d'après guerre à explosé !

Ceux de mon âge ne peuvent le nier !
Les jeunes gens actuels ne peuvent le savoir !

Comme nous l'a démontre Jean Fourastie, l'économie du secteur primaire à été remplacée par celle du secteur secondaire. Actuellement nous sommes encore dans l'économie du tertiaire voire du post-tertiaire.

Cela étant, les progrès continus des technologies de l'informatique, du numérique et de la cybernétique font que le travail humain au quotidien de beaucoup de gens peu ou moyennement qualifiés se réduit comme peu de chagrin...

Contre cela nos politiciens n'y pourront pas grand chose !

La formation à grande échelle aura vite ses limites : de très nombreux BAC ++++ sont au chômage !

De plus, la formation de bon niveau dans les pays peu développés économiquement (et qui ont furieusement tendance à le rester... ) ne leur profite que faiblement car nous, les pays développés, sommes prêts à les utiliser comme des "ressources humaines valables et très peu chères" par rapport à notre niveau de vie à nous !

La mondialisation économique et financière à créé, pour longtemps, de nouveaux esclaves intelligents et instruits qui servent à amortir la baisse, inéluctable pour un bon moment encore, de notre haut niveau de vie...

HPS

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