Quel est le moyen de paiement le plus gratuit ?

Coïncidence, le jour où le ministre des Finances prévient les Français qu’il va interdire de payer plus de 1000 euros en billets Facebook lance un système de paiement entre amis. Quand nos économies sont menacées de croissance nulle cette information mérite qu’on s’y arrête. En apparence, pas de problème. C’est un pas de plus dans la substitution de la monnaie électronique à la vieille monnaie papier. Michel Sapin justifie comme un moyen de lutte contre le terrorisme la division par trois du plafond précédent des règlements en liquide. Et Facebook nous jure que son service – qui permet de payer à distance- est gratuit. Alors, pourquoi s’inquiéter?

Le problème est que la bataille qui est déjà engagée entre banquiers et géants du numérique pour contrôler les paiements de demain n’est pas un grand affrontement de philanthropes. C’est un des aspects de la ruée vers les big data (savoir tout ce que vous payez à qui pour pouvoir vendre ces données). Mais c’est aussi potentiellement un marché très lucratif. Prendre « presque rien » sur chaque transaction pour rémunérer le service de paiement finit par assurer un très confortable chiffre d’affaires à l’intermédiaire. Paypal n’est pas un service gratuit. Pas plus que votre carte bancaire. Demandez aux commerçants ce qu’ils pensent du coût d’un terminal de paiement vous permettant de régler avec votre carte. Nous ne savons pas encore comment Facebook compte se rémunérer, mais eux il savent. C’est donc le seul moyen de paiement incontestablement gratuit pour l’utilisateur dont le ministre des Finances s’apprête à réduire l’utilisation. Certes ce n’est pas tous les jours qu’on a l’occasion de régler plus de 1000 euros en cash. Mais c’est la tendance qui compte. Pourquoi en faire toute une histoire ? Parce que nos économies risquent de s’installer durablement dans une croissance faible voire nulle de la production donc des pouvoirs d’achats. Il faut donc cesser de considérer comme marginaux et sans conséquence tous les petits prélèvements nouveaux sur les revenus des agents économiques. Il faut, au contraire, se poser dès maintenant toutes les bonnes questions sur la manière de limiter les dépenses inutiles et de préserver le pouvoir d’achat. Vive le billet de banque ! En attendant que la BCE nous invente un euro électronique garanti gratuit.   (Alerte écrite dans le cadre du groupe de travail des Vigilants sur les conséquences d’une croissance zéro prolongée)

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Commentaires

Très belle alerte Jean-Claude !

Je me posais justement la question et suite à une discussion entre ami(e)s certains en ont conclu que c'était une atteinte supplémentaire à notre liberté individuelle.

merci Jean Claude pour cette alerte

quand on dit de quelque chose qu'il est gratuit, il est nécessaire de préciser gratuit "pour qui".

Dans le cas présent des paiements en ligne, on ne sait pas toujours qui finance le moyen de paiement, et qui se paye par une "commission" sur le montant réglé. En tout cas la payeur voit la facilité et le coût pour lui, pas pour les autres acteurs.

Quand tu écris "vive le billet de banque", tu omets de rappeler le coût d'un billet de Banque, sans commune mesure avec le coût d'un virement par internet. L'écart est encore plus important entre un chèque et un virement par internet...

amicalement

Cher Philippe
J’ai bien conscience que la fabrication et la gestion des billets a un coût payé d’une manière ou d’une autre par « la collectivité ». J’ai conscience que le chèque et son traitement ont également un coût. Comme moyen de paiement gratuit des sommes importantes je privilégie (en Europe) le virement dont on peu estimer qu’il n’a pas de coût marginal… une fois l’investissement informatique réalisé et sa maintenance assurée. Mais il ne s’agit pas de cela.
Je veux attirer l’attention sur l’effet simple sur le consommateur. Quand on est menacé de croissance zéro ou très lente de l’économie donc des pouvoirs d’achat tous les petits grignotages qui étaient presque insensibles en période de croissance et d’inflation le deviennent beaucoup moins. Qu’il s’agisse de petites taxes parafiscales de rien du tout prélevées par l’Etat et ses prolongations (pensons à toutes les petites lignes de nos taxes locales, factures d’électricité, d’eau etc…) ou qu’il s’agisse de prélèvements d’entreprises privées.
Dans le cas du secteur financier, je te rappelle que son poids dans l’économie s’est sensiblement accru au cours des dernières décennies. Je pense qu’un peu de frugalité va devenir indispensable là aussi.

Jean-Claude, tu as 100% raison sur le danger des petits prélèvements qui s'assimilent à des impôts privés (ou à un racket ?): c'est comme cela que la banque de marché a réussi a devenir ce qu'elle est dans l'indifférence générale. Je te suis moins sur le billet, car les banques arrivent quand même à faire payer le retrait de billets (en tout cas d'un guichet d'une autre banque).

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