Les socialistes veulent mais ...

Chers amis, La France a un nouveau Président socialiste, François Hollande. La France a aussi de graves problèmes  qu’une élection ne va pas faire disparaître d’un coup de baguette magique. Deux sont majeurs et en englobent beaucoup d’autres. Premièrement, la France a un problème de production, sanctionné par le déficit croissant de son commerce extérieur et la destruction de ses emplois. Deuxièmement ses finances publiques sont gravement déséquilibrées ce qui la met à la merci des marchés financiers et lui interdit toute politique de relance massive.

La tentation des Français est d’expliquer ces maux par la mondialisation, de les attribuer à vous, chers amis de Shanghai, au lieu d’en chercher les causes dans le pays. Cette tentation a été mesurée par l’ampleur au premier tour du vote pour Marine Le Pen, candidate du front national et héritière de toute une tradition aujourd’hui pudiquement qualifiée de « populiste », presque 18%. Elle s’était également manifestée à gauche en assurant plus de 17,2% des voix à Arnaud Montebourg, candidat de la « démondialisation », au cours des primaires qui ont permis de sélectionner le candidat socialiste. Le Président sortant a tenté d’effrayer les électeurs au risque de vous effrayer vous aussi chers amis de New York, de Londres, de Hong-Kong, de Sao Paolo ou de Sidney en peignant son adversaire sous les traits d’un irresponsable qui n’aurait de cesse de mener la France à la faillite dès son élection acquise. Rassurez-vous, il n’en est rien. On peut s’interroger sur la capacité de François Hollande à résoudre les problèmes profonds du pays. En revanche il n’est en rien l’idéologue ou l’irresponsable qu’on a pu vous décrire. Les socialistes ne sont plus hostiles aux entreprises privées, mais… Pour ce qui est du premier problème de la France, la production, c’est le mot qu’il a employé lui-même, et qu’il a mis en tête des priorités du pays dès son premier discours de dimanche soir, à Tulle, en Corrèze, au fin fond de la France rurale, avant même de revenir à Paris. Pour assurer la production les socialistes ne comptent plus - comme en 1981- sur les nationalisations et sur la planification. Ils comptent sur les entreprises. Comme ils ne peuvent pas dire trop brutalement à leurs électeurs - notamment les fonctionnaires- que les patrons sont des gens indispensables et fréquentables, ils ont épousé le grand virage à l’œuvre en France depuis plusieurs années en faveur des « entrepreneurs ». L’ancienne compagne de François Hollande, Ségolène Royal, elle-même candidate aux élections présidentielles précédentes, n’y est pas pour rien. Plus généralement, la fréquentation des dirigeants d’entreprises petites et moyennes dans les régions qu’ils dirigent pour la plupart a fait découvrir aux socialistes les richesses potentielles du tissu d’entrepreneurs du pays. Pour le moment leur aggiornamento semble se limiter aux PME (Petites et Moyennes Entreprises) qu’ils opposent, rhétorique politique oblige, aux grandes et surtout aux banques. Mais il n’est pas interdit d’espérer mieux dans l’avenir. Ne pas être hostile à la production et aux producteurs est une chose, la favoriser en est une autre. On peut espérer que le prochain gouvernement n’accroîtra pas trop le coût du travail en France. Il est difficile d’espérer plus. Hollande n’a pas fait de promesses salariales sinon celle de mieux faire profiter les bénéficiaires du salaire minimum de la croissance. Encore faut-il qu’elle soit là. En revanche il va annuler l’allègement de charges qui devait être financé par une augmentation de la TVA (dite sociale). Il faut également prévoir une petite augmentation des cotisations pour financer la retraite à 60 ans pour une petite partie des travailleurs qui ont commencé jeunes et travaillé longtemps. Reste la relance de la production par l’offre et notamment le financement des entreprises. La Banque Nationale de l’Industrie souvent promise par le futur Président est surtout un gadget de campagne destiné à réjouir les oreilles des électeurs de gauche. Il faut en déduire concrètement que le nouveau pouvoir va s’appuyer très fortement sur le puissant dispositif qui existe déjà en France pour aider financièrement les entreprises et notamment les entreprises nouvelles : Oséo, Caisse des Dépôts, Fonds Stratégique d’Investissement. Tout le processus d’investissement dans les nouvelles technologies découlant du « grand emprunt », processus qui est en cours, ne sera pas remis en cause. Si la France et l’Allemagne cherchent une sortie honorable à leur querelle potentielle sur le traité de stabilité et la relance c’est là qu’ils la trouveront : mettre plus d’argent, éventuellement européen, dans les investissements et l’industrie. Les socialistes ne veulent pas démanteler l’industrie nucléaire L’accord passé entre le parti écologiste et les socialistes puis ce qu’en a dit plus d’une fois le président sortant a sans doute contribué à vous donner l’impression, vous qui êtes loin de France, que les Français ont décidé de confier l’Etat à des irresponsables. Ce pays qui a un sérieux problème de production démantèlerait son industrie nucléaire qui est, avec des hauts et des bas, un des secteurs d’excellence de son industrie, et qui assure encore à l’industrie française un prix de l’électricité compétitif. Il n’en est rien. Là comme ailleurs François Hollande a consenti le juste minimum pour satisfaire son électorat sans rien mettre de fondamental en danger. La meilleure preuve ? Aucune mise en garde officielle ni officieuse n’est venue d’EDF, l’entreprise semi publique qui produit et distribue l’essentiel de l’électricité en France. Pourtant EDF est présidée par un ami personnel de Sarkozy et EDF est un des bastions de la centrale syndicale CGT, anciennement proche du parti communiste, dont le leader a ouvertement appelé à voter Hollande. La vérité est que le « mix energétique » de François Hollande convient parfaitement à EDF. Il assure un développement des énergies nouvelles sur lequel le groupe investit (le consortium chapeauté par EDF énergies nouvelles a remporté trois des quatre premières concessions d’éolien en mer). A 50% d’électricité nucléaire en  2025 il assure le maintient du parc existant et son renouvellement (en dehors de la centrale de Fessenheim sur la quelle la filière de démantèlement de centrales anciennes va pouvoir se faire la main) car 50% d’électricité nucléaire en 2025 ce n’est pas la même chose que 50% d’électricité nucléaire aujourd’hui. Tout le monde, sauf EDF, a oublié de faire entrer dans le raisonnement la croissance de la consommation électrique qui accompagne inexorablement la croissance de l’économie, même faible. Les socialistes veulent ramener les comptes à l’équilibre, mais… Le parti qui va prendre le pouvoir en France n’en est pas éloigné depuis suffisamment longtemps pour qu’on puisse craindre les effets de l’inexpérience, notamment à l’égard des marchés financiers. Un des principaux conseillers de François Hollande pendant la campagne, Michel Sapin, a été ministre des Finances par exemple. Les engagements de retour à l’équilibre sur cinq ans annoncés par François Hollande peuvent être pris au sérieux. La principale question reste celle de la part des hausses d’impôt et de la réduction des dépenses. Les prochains gouvernements tiendront-ils et comment l’engagement de contenir les dépenses publiques ? Aucune promesse inconsidérée n’a été faite, mais aucune économie très convaincante n’a été annoncée. Les socialistes ont conscience que la mondialisation existe, mais… Chers amis, si vous avez un peu suivi la campagne pour les élections présidentielles en France, vous avez dû vous demander si les Français connaissent votre existence. Le monde extérieur, au delà de l’Europe, a été absent des débats sinon de manière floue et hostile. Quelles peuvent être les conséquences concrètes de cette ambiance, notamment pour des entreprises étrangères ? François Hollande a tenté, là aussi, de limiter la casse. Il a beaucoup parlé de la France et chanté la marseillaise, mais il n’a pas repris la rhétorique anti-mondialisation d’Arnaud Montebourg bien qu’il ai fait du directeur de campagne de celui-ci sont principal speech-writer. Pour autant il ne faut pas sous-estimer la pression de l’opinion. Il a  beaucoup été question de frontières pendant cette campagne et François Hollande a dû par exemple afficher une attitude assez peu ouverte en matière d’immigration. Conclusion ? Il ne faut pas craindre de dispositions hostiles à l’égard des entreprises ou des investisseurs étrangers mais à un groupe international qui aurait un projet d’OPA hostile sur un groupe français d’une certaine importance, on conseillera d’attendre un peu… Jean-Claude Hazera Journaliste, historien

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