Assèchement de la créativité politique

Aux Etats-Unis, le « New Deal » de la fin des années 30 a été créatif. La préparation et la conduite de la guerre l’ont été également. Le « Plan Marshall » et l’appui donné à la construction de l’Europe ont marqué une profonde novation de la pensée politique. Par la suite, la « guerre froide » a gelé les cerveaux et Eisenhower s’est inquiété, à juste titre, de l’influence croissante du « complexe militaro industriel ». L’amour de la technologie s’est emparé des esprits et l’idée s’est répandue qu’une suprématie militaro technologique pouvait suffire à venir à bout de toutes les crises. De « La guerre des étoiles » (faux bouclier), à l’invasion de l’Irak (illusoire épée), la gestion des crises a privilégié l’action technomilitaire en réduisant à l’extrême l’aspect politique des situations.

En Europe, la création de la CECA, puis celle du Marché Commun, ont concrétisé une nouvelle façon de vivre ensemble. Les « Pères de l’Europe » ont eu suffisamment de créativité pour procéder par tâtonnements, bricoler des institutions, inventer des procédures. Grâce à eux, la notion d’interdépendance a pris corps. Maintenant, elle s’étiole. Non seulement « l’élargissement » a été mal préparé mais l’introduction de l’euro n’a pas été suivie par un minimum d’harmonisation budgétaire et fiscale. Des réactions de défense nationaliste sont adoptées par certains gouvernements (surtout français et c’est grave puisque le moteur de l’idée européenne a longtemps été logé à Paris). La volonté européenne patine, peut-être même régresse-t-elle. En tout cas, l’Europe semble prise de court face à la mondialisation. Sa créativité politique est en panne.

Les systèmes de sécurité collective (ONU, UE, OTAN, TNP, OMC) sont affaiblis, méprisés ou attaqués. Il faut persuader tous les acteurs de la scène politique que la priorité doit être de les renforcer à chaque instant et en toutes circonstances.

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Commentaires

Jacques,
Votre billet mais surtout son titre relèvent bien les problèmes que la société française, en particulier, rencontre. La chute du communisme version URSS a eu pour effet de faire accroire que le capitalisme avait remporté la guerre idéologique. Il en fut autrement puisque le bloc soviétique s'est effondré sous son propre poids mais rien ne nous a été épargné pour nous faire intégrer cette idée comme résultant d'une évidence. De fait, il n'existerait aujourd'hui plus qu'une seule idéologie valable, pas d'alternative. On pourrait alors aussi interpréter les oppositions entre l'Islam radical et les sociétés occidentales : non pas une confrontation religieuse mais idéologique dans le sens où ce sont bien deux modèles de société qui s'opposent, y compris dans la plus grande violence.
L'assèchement de la créativité politique résiderait-il donc là ? Le manque d'imagination qui conduit les dirigeants à être incapable de proposer de nouveaux modèles de société ? Ne serait-il pas temps en ce cas de changer la priorité de nos valeurs ?

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