Allemagne : quelques enseignements

Plusieurs correspondants ont fait part à Vigilances de leurs impressions sur Mme Merkel, l’Allemagne et l’Europe. Leurs rapports sont disparates mais complémentaires.

Ci-dessous, une tentative de résumé.

1/ Angela Merkel devrait dire « merci » à son prédécesseur Gerhard Schröder. Ce chancelier (social démocrate) n’a pas hésité à bousculer son propre parti et sa coalition avec les Verts pour faire adopter en 2002 « L’agenda 2010 » qui étalait, sur plusieurs années, des réformes affectant à la fois le marché du travail, le système de santé et le système des retraites. Il y a eu des remous mais presque toutes les dispositions prévues sont entrées en vigueur. Maintenant, elles portent leurs fruits. C’est toujours comme cela en politique. Les mesures, bonnes ou mauvaises, ne prennent leur plein effet qu’après un certain temps.

2/ Les Allemands ont l’impression d’avoir mérité de faire la course en tête. Après la guerre, leurs sacrifices ont été lourds. Après la Réunification, l’aide, d’Ouest en Est, a été massive. Plus récemment, les salariés ont, à travers « L’agenda 2010 », réévalué leurs priorités et accepté une nouvelle discipline. Maintenant, les exportations représentent 40 % du PIB allemand et les « bonnes gens » ne voient pas pourquoi on devrait demander à un champion de ralentir volontairement.

3/ Les Allemands se sentent plus proches des pays d’Europe Centrale que de ceux d’Europe du Sud. Investir en Tchéquie leur semble normal. La Grèce, à leurs yeux, c’est pour les vacances. Aider les Grecs, voire les Portugais, leur semble une drôle d’idée.

4/ La fierté du bon élève occulte la mémoire. Pas seulement celle du nazisme qui, il y a deux tiers de siècle, a horriblement fait souffrir l’Europe entière, y compris la Grèce. Egalement, la mémoire plus prosaïque des taux d’intérêt élevés, acceptés à contre coeur par les pays d’Europe qui à travers une monnaie commune espéraient aboutir à une union politique. L’Allemagne, alors, avait besoin d’attirer des capitaux pour financer les dépenses de Réunification. La France, sous Mitterrand, a sacrifié une part de croissance sur l’autel européen. Merkel n’en sait pas gré à Sarkozy.

5/ Un 9 mai chasse l’autre. Quand les électeurs du Land de Rhénanie du Nord-Westphalie iront aux urnes le 9 mai prochain, bien peu se souviendront que le 9 mai 1950 – cela fera tout juste 60 ans - Robert Schuman, alors ministre français des Affaires Etrangères, a lancé l’idée du premier marché commun, celui du Charbon et de l’Acier. Comme c’est à partir de là que l’Union a été construite, le 9 mai pourrait être commémoré en tant qu’anniversaire de l’Europe. Telle n’est pas aujourd’hui l’humeur de Mme Merkel. Si son parti, l’Union Chrétienne Démocrate (CDU) perd en Rhénanie du Nord- Westphalie, il perdra la majorité au Bundesrat, la chambre haute du Parlement. Et, c’est en partie pour éviter cette possible défaite que la Chancelière se montre vigoureuse à l’égard de la Grèce et avare des deniers de l’Allemagne.

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